La République populaire de Chine a publié son troisième document officiel visant à définir ses relations stratégiques avec la région dans un monde marqué par des tensions, des incertitudes, des instabilités, des insécurités et des inégalités sociales croissantes. Analyse de Francisco Cafiero, du magazine argentin Perfil.
Dans un monde qui connaît une transition marquée du pouvoir de l’Occident vers l’Orient, et qui est marqué par des tensions, des incertitudes, des instabilités, des insécurités et des inégalités sociales croissantes, de multiples crises s’accumulent, qui ont un impact sur l’ordre international traditionnel et affaiblissent la croissance économique mondiale. Dans ce contexte, la Chine fait irruption avec ses propres stratégies de liaison et de coopération internationale, fondées sur une lecture structurelle des changements en cours.
Dans cette perspective, le géant asiatique identifie le Sud global comme un acteur politique émergent, dont l’influence internationale devrait s’accroître. En particulier envers l’Amérique latine et les Caraïbes, il propose une relation fondée sur le concept de « communauté d’avenir partagé », notion centrale de la diplomatie chinoise contemporaine, sans subordination ni conditionnement politique. Dans ce cadre, la République populaire de Chine a publié son troisième document officiel sur sa politique à l’égard de l’Amérique latine et des Caraïbes, dans le but de projeter et de systématiser cette relation stratégique.
Ce document, dont les antécédents remontent à 2008 et 2016, constitue à la fois une réflexion stratégique sur la région et une feuille de route qui explicite les priorités chinoises en Amérique latine et dans les Caraïbes. Sur le plan opérationnel, il ordonne et systématise les mécanismes de coopération existants et les instruments futurs que la Chine propose de déployer, couvrant les dimensions politiques, économiques, financières, technologiques, culturelles et sociales du développement. Il ne s’agit donc pas d’une déclaration générique, mais d’un cadre programmatique qui vise à projeter à long terme le lien sino-latino-américain.
« Communauté d’avenir partagé » : les relations entre la Chine et l’Amérique latine
Sur cette base, le document structure les relations entre la Chine et la région latino-américaine à partir de cinq programmes visant à approfondir la coopération sous le concept de « communauté d’avenir partagé ». Le premier, le programme de solidarité, s’appuie sur l’articulation politico-institutionnelle pour renforcer le poids de l’Amérique latine et des Caraïbes dans les forums multilatéraux et approfondir la coordination dans des domaines tels que l’Organisation des Nations unies, le G20, le BRICS+ (où l’Argentine devrait avoir pour priorité stratégique de reprendre sa demande d’adhésion), l’Organisation mondiale du commerce et le Fonds monétaire international, organisme dont notre pays est le principal débiteur.
Le deuxième, le programme de développement, se concentre sur la dimension économique et productive, en mettant en avant l’initiative « Belt and Road » comme plateforme pour les investissements et la connectivité, ainsi que la coopération financière à travers des instruments tels que le swap de devises ou l’internationalisation du yuan.
Le troisième axe, dans le cadre du programme des civilisations, met l’accent sur la dimension culturelle et éducative, à travers des bourses de formation, la coopération universitaire, la coordination entre les think tanks et l’échange dans les médias et les contenus audiovisuels, rendant compte des progrès de la Chine en termes de soft power dans la région.
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Le programme de paix, quatrième volet, propose une approche de sécurité coopérative, la défense du droit international, le rejet du recours à la force et la coopération dans les domaines militaire et de la cybersécurité, ainsi que la participation à des missions de paix. Enfin, le programme des peuples intègre la dimension sociale du lien, en mettant l’accent sur la réduction de la pauvreté, la coopération sanitaire et le renforcement des échanges infranationaux, où plusieurs provinces et municipalités, comme c’est le cas en Argentine, déploient des programmes concrets de coopération avec leurs homologues chinois.
Tout d’abord, il est essentiel de souligner que l’Amérique latine et les Caraïbes sont considérées comme un acteur nécessaire et clé pour la construction d’un ordre international plus équilibré que l’actuel. À titre d’exemple, le Brésil, le pays le plus important sur le plan économique et démographique en Amérique du Sud, figure parmi les principales économies mondiales et projette une influence croissante dans les espaces de gouvernance mondiale, tels que le G20 et le bloc BRICS+.
De ce point de vue, la région est considérée comme faisant partie intégrante du Sud global et se caractérise par une tradition diplomatique favorable à la non-ingérence, au dialogue politique et au règlement pacifique des différends. À ce jour, l’Amérique latine reste une région exempte de conflits armés interétatiques et d’armes de destruction massive, ce qui renforce son profil de zone de paix.
Magazine Perfil (Argentine)
Traduit par Espaces Latinos


