Le Honduras rompt ses liens avec Taiwan et se tourne vers la Chine

Le 28 mars 2023, Taïwan a reçu l’ordre de quitter son ambassade au Honduras, sous trente jours, après la rupture des liens diplomatiques. Le pays d’Amérique centrale a également rappelé son ambassadeur et commencé à tisser des liens officiels avec la République Populaire de Chine.

Photo : The Sun Daily

Taiwan perd des alliés. Après le Nicaragua en 2021 et la République-Dominicaine en 2018, c’est au tour du Honduras de rompre ses liens avec l’île et de se rapprocher de la Chine de Xi Jinping. « Le gouvernement de la République du Honduras reconnaît l’existence d’une seule Chine dans le monde, et que le gouvernement de la République populaire de Chine est le seul gouvernement légitime à représenter toute la Chine », déclare dans un communiqué le ministère des affaires étrangères hondurien. « Taïwan est une partie inaliénable du territoire chinois« , poursuit le ministère, ajoutant qu’il s’engageait à partir de samedi à ne plus avoir de relation ou de contact à caractère officiel avec Taïwan.

La diplomatie du chéquier

C’était une promesse de la présidente Xiomara Castro lors de sa campagne électorale. En effet, l’enjeu est de taille. La Chine refusant d’avoir des relations avec les pays reconnaissant Taiwan comme un état indépendant, entretenir des relations diplomatiques avec l’ile privait le pays d’aide et d’investissement chinois. « Ce qui est recherché à travers la relation avec la Chine, c’est de trouver des investissements pour surmonter les défis auxquels le pays est confronté » a déclaré Rodolfo Pastor de María y Campos, le secrétaire d’État hondurien, soulignant que le pays a une dette de plus de 20 milliards de dollars (dont environs 600 millions à Taiwan.)

Le ministre taïwanais des Affaires étrangères Joseph Wu a accusé dimanche le Honduras de « se faire des illusions » au sujet des promesses chinoises d’aide économique. « La Chine n’a pas cessé de tenter d’attirer le Honduras avec des incitations financières » a-t-il déploré lors d’une conférence de presse. Il développe, en affirmant que Honduras avait exigé un « prix élevé » de la part de Taïwan. Ces propos ont été confirmés par Antonio García vice-ministre des affaires étrangères du Honduras, en interview. A plusieurs reprises, le Honduras aurait demandé un prêt de 2 milliards de dollar à Taiwan. Wu le confirme : on parlerait de 2,45 milliards de dollar exigés de Taiwan pour la construction d’un hôpital, celle d’un barrage, et effacer des dettes. Taiwan avait donc peu de chance face aux promesses du géant économique qu’est la Chine.

L’expansion de la Chine en Amérique latine

Désormais, en Amérique, seuls le Guatemala, le Belize, Haïti, les îles des Caraïbes de Saint-Kitts-et-Nevis, Sainte-Lucie et Saint-Vincent-et-les-Grenadines restent les alliés de Taiwan. La Chine renforce chaque fois un peu plus ses liens avec l’Amérique latine, ce qui inquiète les Etats-Unis. En plus de la « diplomatie du chéquier » qu’elle exerce afin d’isoler Taiwan, la Chine a su tirer profit du Covid. Elle a été la première à savoir réagir en envoyant vaccins et masques en Amérique latine, alors que les Etats-Unis et l’Europe avait du mal à gérer leur propre stock. Cette main tendue de la Chine a été soulignée par les gouvernements latino-américain et notamment par le président mexicain Andrés Manuel Lopez Obrador, qui déclare à BBC Mundo que la Chine avait été le premier pays à répondre à son appel à l’aide.

Les relations entre la Chine et l’Amérique latine ne sont pas apparues avec le Covid, bien que la pandémie ait renforcé la dépendance, c’est un phénomène que l’on observe depuis plusieurs décennies déjà. Le commerce entre les deux régions du monde ne cesse d’augmenter. En 2021, la valeur totale des échanges commerciaux entre la Chine, l’Amérique latine et les Caraïbes a augmenté de 41,1 % par rapport à 2020 et atteint un record, malgré la pandémie qui a ralentit les économies. La Chine est actuellement le deuxième partenaire commercial de la région. Certains experts appellent les états latino-américains à la prudence, car ces investissements chinois peuvent générer d’importants déséquilibres commerciaux dans des pays déjà très endettés.

Marie BESSENAY