Importante mobilisation en Argentine face à la condamnation de l’ex-présidente Cristina Kirchner

Il s’agit d’un moment crucial pour le mouvement péroniste en Argentine. La condamnation de l’une de ses figures majeures accentue son instabilité, déjà fragilisé par la victoire de Javier Milei en 2024, et souligne l’urgence de lui trouver un nouveau leadership. Le péronisme est un courant politique populiste de gauche. Ce courant vise la représentation des classes populaires par des politiques progressistes et la mise en place de l’intervention de l’État dans l’économie. Mme Kirchner est une figure emblématique de ce mouvement, ayant été présidente de l’Argentine entre 2007 et 2015. 

Le 10 juin, Cristina Kirchner a été reconnue coupable d’irrégularités dans l’attribution de travaux routiers dans la province de Santa Cruz, dans le sud de l’Argentine, entre 2003 et 2015. Elle a donc été condamnée à six ans de prison et à l’impossibilité de se présenter aux élections législatives provinciales en septembre à Buenos Aires. La défense de l’ex-présidente, représentée par l’avocat Carlos Beraldi, a demandé l’assignation à résidence, qui peut être accordée aux personnes de plus de soixante-dix ans. Mme Kirchner a actuellement soixante-deux ans et a déjà été victime d’un attentat déjoué en 2022, ce qui renforce sa demande. “Ce n’est pas un privilège”, déclare-t-elle, mais plutôt une condition pour la garantie de sa sécurité d’après sa défense.

Initialement, la justice ne s’est pas montrée réceptive face à cette demande car “Les raisons humanitaires qui justifient l’octroi d’une mesure exceptionnelle comme l’assignation à résidence ne sont pas évidentes”. Toutefois, le 17 juin, la justice a accepté la demande de la défense, autorisant ainsi Cristina Kirchner à accomplir sa peine dans sa résidence située dans le quartier de Constitución, à Buenos Aires. Mme Kirchner devrait aussi porter un “dispositif de surveillance électronique”.

Il y a eu de petites mobilisations depuis la condamnation le 10 juin en soutien à l’ex-présidente. Cependant, le Parti Justicialiste, pilier du mouvement péroniste, a annoncé une mobilisation de masse le 18 juin. En effet, avec le slogan “Argentina con Cristina”, la mobilisation a été accompagnée par la police et s’est déroulée dans une atmosphère pacifique et même festive. Pour les partisans de Cristina Kirchner, cette condamnation est injuste car il ne faut pas rendre une figure politique majeure inéligible. Elle est appréciée par une partie de la population grâce aux politiques sociales menées pendant ses mandats, qui ont permis par exemple la démocratisation des universités. De plus, l’impartialité des juges de la cour suprême a été mise en question par Teresa Garcia, secrétaire générale du Parti Justicialiste, qualifiant ce qui se passe de dérive institutionnelle grave.

Le futur du péronisme se montre donc incertain. Certains pointent Axel Kicillof, actuel gouverneur de la province de Buenos Aires comme possible successeur de Cristina Kirchner. Toutefois, d’après les derniers sondages de Management & Fit, Axel Kicillof a un taux de désapprobation de 62%. De plus, Javier Milei pourrait profiter de cet événement. Bien que Mme Kirchner compte un noyau de partisans fidèles, elle suscite aussi une forte opposition au sein de la population. En effet, l’actuel président argentin pourrait utiliser de cette condamnation pour corruption pour renforcer sa rhétorique anti-Etat. Cependant, l’ex-présidente était “ennemie parfaite” pour Javier Milei, qui devra probablement adapter sa stratégie de polarisation pour les élections de 2028.

Cette condamnation marque un tournant dans la politique argentine. D’un côté, on parle de fin de l’impunité, de l’autre on parle de persécution politique. « Nous reviendrons”, a déclaré Mme Kirchner, laissant entendre que cela ne représente pas la fin du péronisme, mais une phase d’adaptation.