Au Guatemala, le congrès annule «l’incendiaire» budget 2021 après des jours de manifestations

En approuvant un budget 2021 qui néglige les dépenses dirigées vers le social alors qu’il favorise le secteur privé, le parlement guatémaltèque a déclenché une vague de protestation généralisée. Ceci, ajouté à la mauvaise gestion des crises par le gouvernement a abouti à l’incendie d’une partie du Congrès, qui se voit maintenant obligé de réviser le budget.

Photo : La Presse Canada

Le Guatemala ne subit pas uniquement une grave crise sanitaire en ce moment comme le reste du monde, mais le pays centre-américain est aussi parmi les victimes d’une des pires saisons d’ouragans de l’histoire. Pour le moment, la région a déjà été touchée par presque une trentaine de tempêtes tropicales, et le Guatemala compte entre 50 et 150 morts à cause du dernier ouragan « Iota », le plus fort pour le moment. 

Au milieu de cette situation, le mardi 17 novembre, le Congrès a approuvé le nouveau budget de l’État pour l’année 2021, le plus grand de l’histoire du pays, lequel arrive à presque 100 milliards de quetzales (autour de 10 milliards d’euros). Ceci représente une augmentation considérable par rapport au budget de cette année, de 87 milliards de quetzales. Une augmentation injustifiable, considérant que la somme destinée aux dépenses sociales reste inchangée, voire même diminuée, alors que celle destinée à des prêts et à des concessions pour le secteur privé aurait été intensifiée. 

Une manifestation a été donc convoquée devant le siège de l’exécutif le samedi 21 contre ce budget, revendiquant de l’indignation envers le gouvernement qui augmente de l’argent partout sauf dans les secteurs les plus en nécessité, dans un pays où plus de la moitié de la population vit sous le seuil de pauvreté, et un enfant sur deux souffre de malnutrition. On estime que près de 10 000 guatémaltèques ont pris les rues ce jour. 

Alors que cette manifestation pacifique avait lieu, à un kilomètre de distance, devant le siège du parlement, un rassemblement plus violent se déroulait. Des manifestants ont installé une guillotine et ont réussi à entrer dans l’immeuble, mettant le feu à quelques bureaux, lesquels ont été vite éteints pas les pompiers. Les manifestants ont alors été dispersés par la police à l’aide de bombes lacrymogènes. Au moment des évènements, les députés ne se trouvaient pas dans l’immeuble. 

Avec une pression de tous les côtés, le président du Congrès, Allan Rodríguez, a annoncé  mercredi dernier que le parlement annulait le projet de budget, avec 121 votes pour, 24 contre et 15 abstention, après s’être réuni dans un centre culturel de la capitale, en tant que siège temporaire. Maintenant, le Congrès (de majorité officialiste), se voit dans l’obligation de réviser et proposer un nouveau budget avant la fin de novembre. S’il échoue, le pays restera avec le même budget de l’année en cours. 

Des deux côtés de la manifestation, les revendications étaient les mêmes : on exige la démission d’Alejandro Giammattei. Le président conservateur et médecin de profession a vu sa popularité s’écrouler bien avant les manifestations. Un sondage réalisé en juillet montrait un taux de 30 % d’approbation seulement. Après les évènements de la semaine dernière, la pression pour sa démission est venue même de ses rangs. Ce vendredi, le vice-président Guillermo Castillo a demandé au président de démissionner tous les deux, « pour le bien du pays », affirme-t-il. Cependant, la réponse du président aux demandes des manifestants fut uniquement « on a le droit de manifester, en accord avec la loi [mais] nous ne pouvons pas permettre que la propriété publique ou privée soit vandalisée ». 

Nicolás BONILLA CLAVIJO