« Constellation Mistral » une exposition à Paris, consacrée à Gabriela Mistral, première femme latino-américaine prix Nobel de littérature

Cette exposition invite à mettre en lumière l’écrivaine chilienne Gabriela Mistral (1889-1957), à la redécouvrir, à la relire et à revivre ses errances, ses vagabondages, ses expériences, qui ont marqué et contribué à forger son œuvre poétique, sa place en tant qu’intellectuelle transnationale, mais aussi en tant que femme intime et en avance sur son temps à plusieurs égards. Une artiste qui se pense à partir de sa terre natale et qui, en fait, voyage avec un morceau de terre de sa vallée dans sa valise, comme quelqu’un qui porte un talisman protecteur.

Ce que l’on découvre ici, dans ce parcours fragmentaire, est le reflet d’une série de regards sur cette figure, et c’est aussi une invitation à imaginer Gabriela Mistral dans ses multiples dimensions, pour observer la complexité d’un univers qu’elle a habité à travers sa correspondance, ses dialogues, ses cartes postales, les lieux qu’elle a visités, les livres qu’elle a lus, les personnes qu’elle a aimées, les jardins et les potagers qu’elle a imaginés, tout en concevant ses œuvres poétiques comme des travaux de toute une vie (à l’instar du Poème du Chili, œuvre posthume).

Si les archives peuvent être lues comme un espace de controverse, cette constellation mistralienne est un échantillon stratifié de son héritage matériel, qui s’ouvre à vous pour démanteler la monumentalisation de son image, afin de replacer ses voix dans la mémoire vivante et infinie. Il s’agit également d’une exposition autour des moments de sa vie, sans doute marquée par de grands événements, mais qui est ici présentée à travers des vers, des dédicaces, des lectures, des objets, des cartes et des lieux afin d’établir une topographie intellectuelle et esthétique.

Nous vous invitons à l’imaginer non seulement à partir de ses mots, mais aussi à partir des images, qui se configurent comme une constellation mistralienne entremêlée. En effet, le travail de constellation implique de revoir, de donner une seconde vie à cette archive mistralienne, à travers les multiples objets qui fonctionnent comme des indicateurs de cette vie intime. Le projet de l’archive et de nous-mêmes en tant que conservatrices vise à élargir la temporalité du document historique, en apportant avec elle un présent dans lequel Mistral fait également partie d’un discours actuel.

Ainsi, le défi a été de rendre compte de la complexité de sa figure, en montrant une Mistral plus expansive, en invitant à imaginer de multiples univers mistraliens. Se souvenir, c’est aussi inviter à reconnecter les archives, à les lire à partir des affects pour repenser les relations entre l’œuvre mistralienne et les différentes matérialités, animaux, livres ; c’est-à-dire l’action de l’humain et du non-humain, au-delà de la survie des images, des voix, des enregistrements et des documents.

Si la lecture et l’écriture relient les absents et les présents, à travers des lettres envoyées, des notes de cahiers, des coupures de presse, des marques dans les livres, ces traces sont des vestiges non seulement du corps de Mistral, mais aussi de son esprit, permettant ainsi de se rapprocher de cette constellation, qui est aussi une invocation à ses mots et à sa poésie.