Vif succès du Brésil primé au dernier festival de Biarritz

Le Festival Biarritz Amérique latine qui vient de se dérouler du 26 septembre au 2 octobre a connu un succès phénoménal pour sa 25e édition. Impossible d’être bien placé si vous n’arriviez pas trente minutes avant les séances de compétition. Les rencontres littéraires ont accueilli Sergio Ramírez et Rodrigo Rey Rosa. La partie musicale était assurée tous les soirs, complétée par un très beau concert de Yuri Buenaventura entouré de ses dix musiciens. Le roi de la salsa, qui était très ému, compléta sa prestation avec des interprétations de Brassens, Aznavour, Nougaro et Brel.

La partie cinéma était très importante avec des compétitions de longs et courts métrages, ainsi qu’une compétition très suivie de documentaires. Il y avait aussi un focus très intéressant sur le cinéma peu connu  d’Amérique centrale. Le jury  remit l’Abrazo  du long métrage à un premier film brésilien, loin d’être parfait A Cidade onde Envelheço de Marilia Rocha. À Bello Horizonte, Francisca une jeune femme d’origine portugaise reçoit son amie Teresa qui veut s’installer au Brésil. Mais Francisca se languit de Lisbonne. On s’ennuie à suivre ces femmes bien immatures. Aquarius qui est actuellement sur les écrans est enfin récompensé à Biarritz  pour ses qualités comme nous l’avons écrit dans la newsletter de la semaine dernière. Il obtient deux prix : le Prix spécial du jury et le Prix d’interprétation pour la grande Sonia Braga. On sait que le film est détesté par le nouveau pouvoir brésilien. Il est interdit aux moins de 18 ans au Brésil sans motif et donc ne pourra pas être diffusé à la télévision dans le pays ; de plus on vient de le supprimer de la sélection aux oscars de meilleur film étranger ! Il n’y a pas de corruption chez les promoteurs, sans doute !

El Invierno d’Emiliano Torres (Argentine) a obtenu le Prix du jury. Il avait déjà été récompensé la semaine dernière au Festival de San Sebastián. Au sud de la Patagonie, les exploitations sont si vastes que leurs propriétaires qui y viennent, ne s’y posent qu’en avion. Les saisonniers eux, entassés à l’arrière de vieux 4×4, y arrivent comme les moutons. Douze heures de travail harassant par jour, de l’alcool et des putes de temps en temps sont les seuls plaisirs. Pour le vieil Evans (Alejandro Sieveking, remarquable, qui a obtenu le Prix d’interprétation masculine), l’heure de la retraite a sonné. Il doit céder la place à un jeune qui veut amener sa famille, mais cet ancien, trop solitaire, au visage buriné y a passé sa vie et quel ailleurs l’attend ? C’est toute la souffrance d’hommes frustres et fatalistes qui transparaît à travers ce drame, opposé à la bonne conscience d’exploiteurs, contremaitres, intermédiaires ou propriétaires.

El Amparo de Rober Calzadilla (Venezuela/Colombie) a obtenu le Prix du public longs-métrages. Il raconte le massacre à la frontière entre le Venezuela et la Colombie de 14 pêcheurs pris pour cible par l’armée qui les considéra comme terroristes. Deux seulement ont réussi à s’échapper et clamèrent leur innocence en vain. Mais 28 ans plus tard, l’armée vénézuélienne n’a toujours pas reconnu les faits. Bien réalisé et bien interprété, le film qui fut d’abord une pièce de théâtre, est réussi, même s’il est un peu didactique. Étaient également en compétition le très discuté Neruda de Pablo Larraín (Voir le compte rendu de Cannes) et Poesía sin fin d’Alejandro Jodorowsky qui sort cette semaine.  Nueva Venecia d’Emiliano Mazza de Luca (Colombie), Abrazo du documentaire,  est le nom d’un village lacustre qui a subi un massacre et la communauté veut récupérer son seul lieu de rassemblement sur la terre ferme, le terrain de foot. Un beau festival, même si la programmation des longs métrages était beaucoup plus déséquilibrée que l’an passé, au bord d’un très bel océan.

Alain LIATARD