Traduit de l’anglais, le dernier livre de l’écrivain chilien c’est de la bombe… Benjamín Labatut raconte le destin de certains scientifiques dans un livre qui est bien plus que leur histoire – qui est le roman de la pensée.
Photo : Éditions Grasset
Prodige de la littérature contemporaine, Benjamín Labatut est né à Rotterdam en 1980. Il a grandi à La Haye, Buenos Aires et Santiago du Chili, où il vit encore aujourd’hui. Benjamín Labatut est l’auteur de recueils de nouvelles et d’essais où la littérature rencontre toujours l’histoire des sciences. Lauréat du English Pen Award et finaliste de l’International Booker Prize, son précédent roman, Lumières aveugles (Seuil, 2020), lui a valu un succès mondial.
John von Neumann a posé les bases mathématiques de la mécanique quantique, inventé la théorie des jeux, créé le premier ordinateur moderne et joué un rôle clé dans le projet Manhattan, la construction de la bombe atomique américaine. Mais lorsque, à la fin de la Seconde Guerre mondiale, il conçoit le Maniac, une calculatrice qui selon ses mots « saisirait la science à la gorge en libérant une puissance de calcul illimitée », personne ne se doute que le monde est sur le point de changer pour toujours. Car le Maniac, produit d’un esprit logique, cynique et visionnaire, ouvre les perspectives infinies de l’intelligence artificielle – à même de menacer la primauté de l’espèce humaine.
Benjamín Labatut place von Neumann au centre d’un roman qui débute avec Paul Ehrenfest, physicien autrichien et ami d’Einstein devenu fou après avoir compris que la science et la technologie allaient devenir des forces tyranniques. Maniac se conclut une centaine d’années plus tard, au cœur d’une partie de Go entre le Maître sud-coréen Lee Sedol et AlphaGo, un programme d’intelligence artificielle. Le monde assiste alors à la naissance d’une forme d’intelligence encore hybride et capricieuse, qui se trompe, mais agit aussi par inspiration pure. Et d’autres suivront, toujours plus puissantes, toujours plus terrifiantes…
Selon le critique de Nouvel Observateur, Didier Jacob signale, dans sa chronique sur le livre de Labatut, : « Captivant page-turner, Maniac est un remarquable hommage aux « Martiens », ainsi que l’on surnommait cette poignée de scientifiques débarqués de leur soucoupe « à cause d’une blague que Fermi (le physicien italien) avait faite quand quelqu’un lui avait demandé si les extraterrestres existaient : Bien sur qu’ils existent et vivent déjà parmi nous. C’est juste qu’ils se font appeler les Hongrois ».
Triptyque inquiétant sur les rêves du XXe siècle et les cauchemars du XXIe, Maniac entraîne le lecteur dans les labyrinthes de la science moderne et lui laisse entrevoir l’obscurité qui la nourrit. Un roman vertigineux sur les limites de la pensée et les délires de la raison.
D’après les éd. Grasset
Maniac de Benjamin Labatut, traduit de l’anglais par David Fauquemberg aux éditions Grasset, 448 p., 25 euros.