L’exposition du Jeu de Paume qui rend hommage à Tina Modotti

Le Jeu de Paume rend hommage à Tina Modotti (1896-1942) à travers une grande exposition, la plus importante jamais consacrée à Paris à cette photographe et activiste politique d’origine italienne.

Photo : Jeu de Paume

La vie de Tina Modotti (née Assunta Adelaide Luigia Modotti  à Udine, Italie, 1896 – Mexico, 1942) a été marquée par quelques-uns des événements historiques les plus importants de la première moitié du XXe siècle : l’émigration économique des Européens vers l’Amérique, la naissance du cinéma muet sur la côte ouest des États-Unis, les mouvements agraires postrévolutionnaires au Mexique, l’essor du muralisme politique, la revendication de la culture indigène mexicaine, l’émancipation des femmes dans la sphère publique, l’opposition entre staliniens et trotskistes après la révolution russe de 1917 et la guerre civile espagnole.

Le père de Tina Modotti est mécanicien à Udine. Un oncle, Pietro Modotti, est un photographe réputé dans la même ville. En 1897 ou 1898, la famille s’installe dans les environs de Klagenfurt en Autriche où son père a trouvé un emploi dans une usine de bicyclettes. La famille revient à Udine en 1905 et la jeune Tina doit recommencer ses études primaires au début, en italien, après les avoir faites en allemand à Klagenfurt. La réadaptation lui est difficile, notamment à cause de la différence d’âge avec ses condisciples. Son père émigre en Amérique vers 1908 avec sa fille aînée, où il rejoint un de ses frères, établi en Pennsylvanie depuis 1904. Au bout d’un an, il doit abandonner ce projet, qui est un échec et, revenant à son métier d’origine, il ouvre un atelier de mécanique, où il fait surtout des réparations en tout genre. Pendant ce temps, la famille restée à Udine se trouve plongée dans une grande pauvreté. À 12 ans, Tina Modotti travaille douze heures par jour dans une usine textile et est la seule à apporter un salaire à la maison pour nourrir sa mère et ses quatre frères et sœurs.

Elle fait partie d’une génération de femmes qui a apporté une contribution majeure à la photographie des années 1920 et a exercé une grande influence sur la photographie mexicaine ultérieure, de Manuel Álvarez Bravo à Graciela Iturbide. Modotti s’est initiée à la pratique de la photographie grâce à Edward Weston ; toutefois, son œuvre, qui développe une vision très personnelle, dépasse l’enseignement formaliste de ce dernier. Après son émigration économique depuis la ville italienne d’Udine jusqu’à San Francisco et Los Angeles, Modotti part pour le Mexique, où elle participe à la « renaissance mexicaine » et à l’effervescence culturelle postrévolutionnaire. Intégrée au cercle des artistes et des muralistes établis sur place, elle allie rapidement une « photographie incarnée » au formalisme de Weston. Militante du Parti communiste mexicain (PCM) dès 1927, elle dénonce la condition des démunis avec son appareil photo, insistant notamment sur la construction d’un nouvel imaginaire autour des femmes mexicaines.

En 1930, Modotti est expulsée du Mexique en raison de son engagement communiste. Elle vit alors pendant plusieurs années en Union soviétique, où son militantisme photographique se transforme en activisme. Au milieu des années 1930, le Parti communiste soviétique l’envoie en Espagne. Durant la guerre civile, elle organise l’évacuation des « enfants de la guerre », coordonne la gestion des hôpitaux militaires et mène à bien les missions relatives à la propagande. À la suite de la défaite des républicains en 1939, elle traverse les Pyrénées aux côtés de milliers d’exilés. Épuisée et désillusionnée par l’issue de la guerre d’Espagne, elle doit à nouveau quitter l’Europe. Elle décède en 1942 dans la ville de Mexico.