Les faits de l’actualité latino-américaine du 17 au 24 février

17 février – ARGENTINE – L’organisme régulateur des médias audiovisuels de l’Argentine a approuvé la proposition du premier groupe de médias du pays, Clarín, de diviser ses activités en six unités distinctes. Ainsi, le conglomérat qui pendant six ans, est devenu un ennemi du gouvernement de Cristina Fernández de Kirchner, avec des critiques mutuelles permanentes, sera adapté à la loi sur la radio et la télévision approuvée en 2009 par le Congrès argentin, non seulement par les partisans de la présidente mais aussi par l’opposition progressiste.

18 février – VENEZUELA – Après que le quotidien Últimas Noticias ait identifié un agent – sans uniforme – du Service bolivarien de renseignement (Sebin) qui tirait sur les opposants lors de la manifestation du 12 février, à Caracas, le général Manuel Bernal, directeur de la Sebin – directement rattachée à la présidence de la République – , a été limogé. Entouré de dizaines de milliers de manifestants venus lui apporter leur soutien, Leopoldo Lopez, dirigeant de l’opposition vénézuélienne, s’est rendu aux autorités. L’opposant est accusé par le pouvoir d’être le responsable de la mort des trois manifestants, à Caracas, le 12 février.

18 février – BRÉSIL – Après le mandat controversé de Marco Feliciano (Parti chrétien-social, CFP), pasteur évangélique ouvertement homophobe et raciste, le Parti des Travailleurs a décidé d’assumer la direction de la Commission des droits de l’homme et les Minorités du Congrès pour éviter que le député du Parti Progressiste – qui malgré son nom est héritier de la dictature – Jair Bolsonaro, militaire homophobe connu par ses positions extrémistes, occupe la présidence avec le soutien des évangélistes.

18 février – COLOMBIE – Deux jours après que soient connues certaines conversations du commandant général des forces armées de Colombie Leonardo Barrero Gordillo avec un colonel suspect de meurtres extrajudiciaires de deux civils, le président Juan Manuel Santos a annoncé que ce général était démis de ses fonctions parce qu’il estimait que les expressions utilisées par le général étaient « irrespectueuses » envers la justice.

18 février – CELAC – La Communauté des États d’Amérique latine et les Caraïbes (CELAC), a déploré la violente crise qui secoue le Venezuela depuis la semaine dernière et a encouragé le gouvernement du président vénézuélien Nicolas Maduro, « de poursuivre les efforts pour promouvoir le dialogue entre toutes les forces politiques. » Dans un communiqué publié dans la capitale du Costa Rica, le CELAC a appelé que soient garantis « l’information véridique et exacte » et le plein respect de « tous » les droits de l’homme. La communauté, a-t-il ajouté, « était consternée par les actes de violence » et a déploré « la perte de vies humaines. »

19 février – VENEZUELA – L’opposant Leopoldo Lopez a été placé dans une prison militaire, dans la banlieue de Caracas, où il attend d’être interrogé par un juge. Le dirigeant de l’opposition, tenu responsable des manifestations qui ont fait trois morts le 12 février, est inculpé d’homicides et de terrorisme, parmi d’autres charges. Dans une vidéo enregistrée avant de s’être livré aux autorités, Leopoldo Lopez appelle ses partisans à poursuivre la mobilisation. La police a dispersé violemment des manifestants dans l’est de Caracas. Le bilan des morts est passé à quatre personnes après le décès d’une manifestante de 21 ans, blessée par balles la veille à Valencia (nord).

20 février – PANAMA – La société d’état la Autoridad del Canal de Panamá (ACP) et le consortium de construction Grupo Unidos por el Canal (GUPC) mené par la Sacyr espagnole sont arrivés à un accord préliminaire et les travaux sur le canal ont repris. L’Autorité du Canal paiera 26,8 millions d’euros au consortium pour la reprise du travail. Malgré la crise, les vielles écluses centenaires ont continué à fonctionner normalement.

22 février – MEXIQUE – Le chef du cartel de Sinaloa, Joaquín Guzmán Loera, El Chapo (surnom du à sa petite taille), a été arrêté par les autorités au Mexique, en collaboration avec les États-Unis. Le chef du cartel de Sinaloa, la plus grande organisation criminelle du pays, a été capturé vivant dans un hôtel dans la ville de Sinaloa, sur la côte Pacifique. Joaquín Guzmán Loera avait été arrêté au Guatemala en 1993 et huit ans plus tard, en janvier 2001, il s’était évadé d’une prison de haute sécurité dans l’État de Jalisco caché dans un panier à linge. Depuis lors, il est devenu le plus célèbre trafiquant de drogue dans le monde.

20 février – VENEZUELA – Le gouvernement vénézuélien a reconnu le grave problème de l’ordre public qui existe à San Cristobal, capitale de l’Etat de Tachira, à la frontière avec la Colombie. Le ministre de l’Intérieur et de la Justice, Miguel Rodriguez Torres, a assuré qu’à cause des protestations des citoyens un couvre-feu virtuel avait été imposé. Le gouvernement a décidé de suspendre le port d’armes et d’envoyer des renforts de la garde nationale pour rétablir l’ordre. Le président Nicolas Maduro a menacé d’imposer l’état d’urgence dans la ville, si ces premières décisions ne permettent pas de reprendre le contrôle de la ville.

20 février – PARAGUAY – « Les Etats dits développés nous font tord avec leurs émissions et ensuite dévastent nos champs en les consacrant à produire des biocarburants au lieu de la nourriture » a déclaré l’ancien ministre de l’Environnement du Paraguay (de 2009 à 2012) Oscar Rivas – Prix Goldman en 2000 (sorte de Nobel de protection de l’environnement) – qui lutte pour que les populations puissent disposer de leurs terres pour cultiver de la nourriture. Il constate qu’au cours des dix dernières années, le Paraguay a vu la proportion de terres consacrées à la production de céréales destinées à la fabrication des agro carburants utilisés par les pays développés se multiplier par quatre, entraînant un important phénomène de déforestation.

20 février – BRÉSIL – Le procureur brésilien Ivan Marx a déposé une plainte pour crime présumé devant le tribunal de la province de Corrientes, dans le nord de l’Argentine, qui avait déjà enquêté depuis des années sur la mort du président brésilien João Goulart (1961-1964) en 1976 en Argentine. Il existe de plus en plus des preuves que de la mort du président brésilien n’était pas due à une crise cardiaque mais qu’il a été empoisonné lors des opérations du Plan Condor, programme de coopération des régimes militaires de la plupart des pays sud-américains pour éliminer les opposants. Le procureur brésilien a également produit des documents qui auraient prouvé que l’ancien chef de l’État et une douzaine d’autres exilés brésiliens ont souffert de persécutions et de la surveillance des régime de leur pays, ainsi que de l’Argentine et de l’Uruguay.

20 février – HAÏTI – L’ex-dictateur Duvalier sera jugé pour « crimes contre l’humanité » a décidé la cour d’appel de Port-au-Prince. Les trois magistrats de la cour ont considéré que ces crimes étaient imprescriptibles. Ils ont ordonné la reprise de l’instruction dans le cadre des poursuites engagées par des victimes de la dictature contre l’ancien président à vie qui était rentré en Haïti en janvier 2011 après vingt-cinq ans d’exil en France. Surnommé « Bébé Doc », il est accusé d’assassinats, de tortures et de disparitions, ainsi que de corruption et de détournement de fonds.

21 février – PÉROU – La province de Cajamarca (nord) est le théâtre de nouveaux affrontements entre forces de l’ordre et paysans opposés au projet Conga, une mine d’or et de cuivre à ciel ouvert. Porté par la compagnie américaine Newport, le projet a été suspendu fin 2011, mais la vidange de quatre lacs, remplacés par des réservoirs artificiels, se poursuit. Le conflit a fait cinq morts depuis 2012.

21 février – VENEZUELA – Le Procureur général de la République, Luisa Ortega Díaz [photo], a reconnu, lors son intervention hebdomadaire de radio, le bilan huit personnes tuées et 137 blessées au cours des manifestations au Venezuela depuis le 12 Février. Ce chiffre représente le premier rapport officiel de la semaine dernière, lorsque trois personnes ont été tuées dans une manifestation organisée par l’opposition à l’occasion de la Journée de la jeunesse. Le ministère public a enregistré 24 personnes emprisonnées durant les protestations et 80 autres présentées à la justice pour les délits commis dans différents états du pays. La presse de l’ONG Human Rights Watch a également fait l’écho de la décision du président Nicolas Maduro de censurer les médias de communication.

23 février – ÉQUATEUR – Quito, Guayaquil et Cuenca, les trois grandes villes de l’Equateur, ont donné leur voix à l’opposition dans les élections locales. Cela peut être interprété comme un rejet du parti du président Rafael Correa au pouvoir, Alianza País, qui cherchait à consolider son pouvoir dans les circonscriptions régionales. Les trois projets politiques qui se sont imposées dans les urnes doivent leur victoire aux alliances politiques qu’ils ont faites pour cette élection. Le président Rafael Correa a reconnu que l’une des erreurs de son mouvement a été de pas ne chercher des alliances politiques avec d’autres organisations. « Je crois que nous sommes tombés dans le sectarisme. Je ne me peux pas m’occuper tous les jours du mouvement, mais je crois que ce sectarisme nous passe sa facture« , a-t-il dit après la diffusion des résultats électoraux.

24 février – BRÉSIL – Le septième sommet UE-Brésil qui réunit à Bruxelles le président de l’exécutif européen, José Manuel Barroso, la présidente du Brésil, Dilma Rousseff, et le président du Conseil européen, Herman Van Rompuy, va essayer de conclure à Bruxelles un accord commercial entre les pays européens et le Mercosur (du bloc commercial regroupant l’Argentine, la Bolivie, le Paraguay, l’Uruguay, le Venezuela et le Brésil). La négociation n’a pas progressé dans ces quatre dernières années. Bien que l’intention initiale soit de donner un point final aux négociations entre l’UE et le Mercosur, la réticence du gouvernement argentin a obligé les parties à réduire temporairement leurs perspectives et à ne pas rejeter une négociation à deux vitesses. À cette fin, des sources communautaires considèrent la possibilité de signer, d’abord, un accord avec le Brésil qui pourrait s’étendre postérieurement au reste de membres de Mercosur. En outre, ils vont essayer de rapprocher leurs positions sur la situation au Venezuela, où il y a eu au moins 10 morts dans des affrontements entre groupes d’opposition au gouvernement de Nicolas Maduro et la police.

Guy MANSUY