Photo : Bentik Paulus
L’espoir renaît au Suriname. Après avoir connu de multiples rébellions et coups d’État à la suite de son indépendance vis-à-vis des Pays-Bas, obtenue en 1975, le petit pays d’Amérique du Sud, touché par une crise socio-économique latente pourrait connaître une vague de changements sans précédent avec l’arrivée à la présidence de Jennifer Geerlings-Simons.
Le Suriname est un pays particulier. Il s’agit du pays doté de la plus grande couverture forestière au monde avec 94 % de son territoire composé de forêts. Ce pays, dont la langue officielle est le néerlandais, jouit en réalité d’une véritable mosaïque linguistique. La majorité de la population est concentrée sur le littoral dont plus de la moitié dans la capitale : Paramaribo. Parmi la dizaine d’idiomes utilisés par ses 640 000 habitants, on retrouve l’anglais, le javanais, le hindi, le portugais brésilien ou encore des langues créoles comme le sranan tongo (littéralement, “langue du Suriname”).
Dans ce pays où le débat sur l’identité nationale fait encore rage, une petite révolution politique a eu lieu. L’opposante Jennifer Geerlings-Simons, 71 ans, a été élue dimanche 6 juillet présidente par le Parlement du Suriname, devenant la première femme à diriger l’ancienne colonie néerlandaise.
Le parti politique de Jennifer Geerlings-Simons, le NDP (Parti national démocratique), est connu dans le paysage politique surinamien en raison de son ancien dirigeant. En effet, le NDP est le parti de l’ex-président Desi Bouterse, qui a dirigé le pays d’une main de fer après un coup d’État en 1980, puis démocratiquement entre 2010 et 2020. Desi Bouterse a par la suite été accusé de corruption, de répression abusive des opposants, et a été condamné par la justice hollandaise, ce qui l’a conduit à vivre dans la clandestinité avant de mourir en décembre dernier.
Alors que les instances internationales considéraient le Suriname comme un narco-État sous le mandat de Bouterse, le trafic s’est réduit sous le mandat du président sortant Chan Santokhi. Le parti présidentiel, le Parti progressiste de la réforme (VHP) n’a pas réussi à remporter les élections législatives du 25 mai face à l’alliance du NDP avec de petits partis. Le quinquennat de Chan Santokhi prendra fin le 16 juillet avec l’investiture de Jennifer Geerlings-Simons, alors que le VHP avait décidé de ne présenter aucun candidat pour l’élection présidentielle.
Jennifer Geerlings-Simons va avoir fort à faire dans un pays où la crise socio-économique perdure avec un taux de pauvreté atteignant 20 %. Face à cela, la future présidente peut compter sur une ressource : le pétrole. Après la découverte de grands gisements pétroliers offshore, c’est l’occasion de changer la face du pays grâce à des revenus financiers inédits qui devraient arriver d’ici 2028 avec le début de l’exploitation d’un bloc offshore.
Au lieu des 5000 à 6000 barils actuels, la production atteindra 222 000 barils par jour, selon les estimations. Une hausse conséquente qui, selon les promesses de Jennifer Geerlings-Simons , profitera à tous les Surinamais. Dans son programme relativement populiste, la nouvelle présidente prévoit une distribution généreuse des royalties pétroliers, ainsi qu’un renforcement des relations avec la Chine. Le moment du changement est peut-être arrivé au Suriname, avec l’évocation, lors de son discours de remerciement, d’une loi selon laquelle toutes les entreprises devront travailler avec des Surinamais et acheter des produits locaux.
Martin PERILLAT