Les tensions au Moyen-Orient et l’Amérique latine

La guerre entre l’Iran et Israël -et dorénavant les Etats-Unis–crée une incertitude majeure sur les marchés internationaux de l’énergie, ressource essentielle dans les sociétés contemporaines. Certains pays latino-américains sont exportateurs nets de pétrole et de gaz et on peut présumer qu’ils tireront un bénéfice de la situation. C’est le cas du Brésil, de la Colombie, du Venezuela et de l’Équateur. A l’instar de la Russie, ces pays bénéficieront de l’augmentation des prix de l’énergie. Pour ces gouvernements, les recettes additionnelles provenant des exportations se traduiront par une amélioration de leur balance commerciale, de leurs recettes fiscales et d’un renforcement de leurs monnaies.

Rien de certain et de mécanique dans ces hypothèses et processus car, depuis l’accession de Donald Trump à la Maison Blanche, les acteurs de l’économie mondiale sont d’une extrême prudence quant à leurs prévisions, actions et réactions. De fait, on voit que les peurs concernant le blocage possible du Détroit d’Ormuz par l’Iran et le désordre dans les approvisionnements qui en résulteraient a déjà fait monter substantiellement le baril de pétrole le 22 juin, au lendemain des frappes américaines sur les sites nucléaires en Iran (Bloomberg). Depuis le 13 juin, Israël a rendu inopérant le plus grand complexe d’extraction de gaz de l’Iran.

Pour les pays latinos dont l’économie est dépendante des importations des hydrocarbures, l’augmentation de leur prix serait dommageable pour les populations en proie à une inflation déjà très haute. Quand le prix de l’énergie augmente il entraine une augmentation en chaine de tous les prix. C’est là le savoir pratique et quotidien de toutes les populations dans le monde, dans leurs foyers, leurs déplacements et leur alimentation en particulier. L’Argentine, le Venezuela (pays pétrolier) sont en proie à une inflation déjà astronomique. Les pays latino-américains qui ne produisent pas d’hydrocarbures en quantité suffisante sont donc en alerte rouge. Cela est le cas du Chili, du Pérou, de l’Uruguay et d’une bonne partie de l’Amérique centrale et des Caraïbes.

Avec l’augmentation des prix de l’énergie, les effets sur les prix sont directs et immédiats et élèvent les risques de tempêtes économiques et sociales On se rappelle que les révoltes de la faim et de la précarité avaient commencé au Brésil et au Chili, en particulier chez les jeunes, indignés par l’augmentation du prix des transports publics. Bien sûr, les investissements publics et privés seront reportés ou annulés du fait de l’augmentation des taux d’intérêts bancaires et des incertitudes sur la durée et l’ampleur de la guerre au Moyen-Orient. La prudence des investisseurs nationaux et internationaux ainsi que l’appauvrissement des populations auront donc un effet paralysant sur les projets d’infrastructures et le fonctionnement général des économies latino-américaines. 

Les tensions actuelles constituent pour les pays d’Amérique latine et des Caraïbes un test sur la solidité de leurs politique énergétiques et la résilience de leurs économies. Bien que différemment, tous les pays de la région sont affectés par le contexte externe. Dans cette période tourmentée, un autre test se présente aux pays concernés, celui de la coordination, de la coopération et de la solidarité entre les pays de la région dotés de capacités exportatrices d’énergie et ceux dont la dépendance devient plus coûteuse.