Photo : Eraldo Peres
Le 17e sommet des BRICS s’est déroulé du dimanche 6 juillet au lundi 7 juillet au sein du Musée d’Art Moderne de Rio de Janeiro. Censé représenter les pays en développement et le “Sud global” dans un cadre multipolaire, on peut se demander si les BRICS constituent avant tout un réseau d’alliances opportunistes ou un contre-pouvoir uni face à l’Occident.
Fondés en 2009, les BRICS réunissent le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud. Avec les élargissements récents, on parle désormais de “BRICS+”. On compte actuellement 11 membres au sein de l’organisation avec l’adhésion de l’Arabie saoudite, de l’Égypte, de l’Éthiopie, des Émirats Arabes Unis, de l’Iran et de l’Indonésie. De plus, il y a une dizaine d’États associés (Cuba, Nigeria, Vietnam…) et des États comme le Mexique, la Turquie ou encore l’Angola étaient également invités à participer au sommet.
En résumé, la moitié de la population mondiale est représentée lors de ce sommet. Ce qui n’est pas anecdotique, d’autant plus qu’il s’agit de 40 % du PIB mondial.
Ce sommet a été l’occasion pour les participants de réitérer leur volonté commune de défendre le multilatéralisme face à l’unilatéralisme américain. Adoptant un ton relativement modéré, les États-Unis n’ont pas été explicitement cités mais la politique de Donald Trump visant à imposer de plus en plus de taxes douanières a été condamnée unanimement. En effet, ce dernier menace d‘imposer des droits de douane de 100 % sur les importations en provenance des pays membres des BRICS et des droits de douane supplémentaires de 10 % pour tout pays s’alignant sur les politiques anti-américaines des BRICS.
Considéré comme un frein au développement économique mondial par les BRICS, cette augmentation des mesures douanières et non douanières par les Etats-Unis n’est pas le seul problème auquel les BRICS sont confrontés. Ceux-ci ont décidé de condamner les frappes menées par les Etats-Unis et Israël sur l’Iran en apportant leur soutien à un État membre. Ils ont également condamné les bombardements menés par Israël sur la bande de Gaza et l’attaque terroriste au Cachemire. Néanmoins, le dossier ukrainien a soigneusement été évité et la guerre menée par la Russie n’a nullement été condamnée.
Par ailleurs, la liste des représentants présents marque un revers diplomatique pour le Brésil, pays hôte du sommet. Bien évidemment, le président brésilien Lula était présent tout comme ses homologues Indien et Sud-Africain, Narendra Modi et Cyril Ramaphosa. En revanche, les absences notables de Vladimir Poutine et Xi Jinping ont marqué le sommet. La Chine était représentée par son Premier ministre Li Qiang et la Russie par son ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov.
Ces absences peuvent illustrer un certain relâchement dans les attentes liées à l’organisation, d’autant plus que les pays membres peinent à s’accorder sur une politique commune. La question des objectifs communs est cruciale alors que le groupe devient de plus en plus hétérogène en raison de son élargissement à des rivaux régionaux et à de grandes économies émergentes. Le projet bat de l’aile et les accords restent limités. Par exemple, un possible financement des forêts tropicales par la Chine et les Émirats Arabes Unis a été évoqué lors d’une réunion avec le ministre des Finances brésilien.
Certes, le G7 et le G20 ont perdu leur prédominance sur la scène internationale mais les BRICS peinent à venir concurrencer l’Occident en raison des divisions internes. Au sein des BRICS, il existe une opposition entre un axe dur et un pôle modéré quant aux relations à entretenir avec les Occidentaux. Des pays sont favorables à la dédollarisation tandis que d’autres sont favorables à une dépendance persistante au dollar.
Sur le plan économique, la Nouvelle Banque de développement (NBD) peine à incarner une alternative crédible à la Banque mondiale : 33 milliards de prêts cumulés depuis 2015 contre plus de 100 milliards annuels pour cette dernière. De plus, la proposition chinoise d’un yuan internationalisé relève du fantasme et rencontre des résistances internes.
Les BRICS misent avant tout sur le multilatéralisme comme la Nouvelle Banque de développement le montre. Cette initiative de garanties conjointes est censée profiter aux États membres. Au cours du sommet, le chef d’État angolais et président en exercice de l’Union Africaine João Lourenço est intervenu et a appelé à renforcer ce multilatéralisme. Au-delà de ce multilatéralisme de façade, l’adhésion aux BRICS ne fait pas l’unanimité comme c’est le cas avec l’Argentine qui a décidé de se retirer du processus d’adhésion.
Durant son discours, Lula n’a pas manqué de faire un parallèle avec le mouvement des non-alignés durant la Guerre Froide. La majorité des participants ont exprimé leur souhait de voir l’Ethiopie et l’Iran intégrer l’Organisation Mondiale du Commerce. En effet, en parlant au nom des pays en développement, les BRICS appellent à la réforme de certaines institutions internationales.
C’était aussi l’occasion pour le Brésil de Lula, qui accueillera le sommet des Nations Unies sur le climat en novembre, de rappeler le sérieux avec lequel les pays en développement s’attaquent au changement climatique alors que les Etats-Unis brillent par leur inaction climatique.
Martin PERILLAT