Guerre dans les prisons brésiliennes et le nouveau site Prison Insider

Les dizaines de morts dans plusieurs massacres qui secouent les prisons du nord du Brésil sont le résultat d’une guerre entre factions rivales pour le contrôle des routes fluviales de la drogue. La promiscuité dans les prisons brésiliennes favorise les bandes narcos. En France, l’ONG Prison Insider ouvre un site  d’information sur les prisons dans le monde.

Photo : WordPresse.com

Plus de 60 morts dans le complexe pénitentiaire  Anicio Jobim de Manaus dans l’État d’Amazonas,  plus de 30 morts dans la prison de Monte Cristo située dans les faubourgs de Boa Vista, capitale de l’État de Roraima, dans le nord du pays. C’est le résultat d’une véritable guerre entre bandes narcos pour le contrôle des routes de la drogue dans tout le Brésil. La cocaïne venant de Bolivie et du Pérou via le fleuve Ucayali transite par le nord du Brésil via le fleuve Solimaes jusqu’à Manaus. De là, les chargements de drogue continuent par avion ou par bateau sur le fleuve Amazone jusqu’à la côte atlantique d’où ils partent vers l’Europe, les États-Unis ou les grandes villes brésiliennes.

« Éliminer la concurrence »   Cette section de la route du nord du Brésil est contrôlée par la bande Commando Vermeil (CV) originaire de Rio. Le sud du pays (y compris de nombreuses prisons) est contrôlé par le gang Premier Commando de la capitale (PCC), né dans l’État de Sao Paulo et le cartel le plus puissant du pays. Dirigé par Herbas William Camacho, dit « Marcola », l’intention du PCC de pénétrer et contrôler les fleuves du nord Brésil, est à l’origine de la formation du gang Familia del Norte (FdN) qui s’est allié au CV.  Les massacres dans les prisons sont la réponse de la Familia au PCC : « On éliminera toute  concurrence ! »

Des prisons surpeuplées.   Comme partout dans le monde, les prisons  brésiliennes sont surpeuplées. Selon une étude du ministère public, « les prisons reçoivent 70 % de prisonniers au-delà de leur capacité maximum ». Le centre de détention Jobim de Manaus, construit pour 454 prisonniers, en comptait 1 200 en décembre 2016. À Boa Vista, il y a 1 500 prisonniers pour 700 places et deux W.-C. pour 280 personnes. L’Ordre des avocats du Brésil envisage de porter la situation devant la Cour interaméricaine des droits de l’homme (CIDH).

Un État indifférent ou corrompu.   Le gouvernement de l’État d’Amazonas déclare pourtant que son administration suivait de près les actions des bandes narcos depuis le début de 2016. Ce qui contredit son propre gouverneur, José Melo qui affirme, lui, qu’aucun indice n’annonçait cette confrontation… Pour le président de facto Michel Temer et son ministre de la Justice, Alexandre de Moraes, « il ne s’agit pas là d’une lutte entre factions, mais bien des conséquences d’un afflux de réfugiés venus du Venezuela »… Pourtant, selon des médias locaux, un accord secret lierait le chef de Familia del Norte, José Roberto Fernandes Barbosa, alias « Perturbado » ou « Messi », à l’ancien secrétaire de l’Administration pénitentiaire de l’État d’Amazonas, le colonel Luisimar Bonates.

Une nouvelle ONG française pour informer sur les prisons dans le monde.  Prison Insider s’annonce comme un site d’information sur les prisons dans le monde,  « un voyage peu commun dans l’une des régions les plus méprisées du monde : le pays de l’enfermement et ses plus de dix millions d’habitants ».  Des mots et des images pour comprendre et voir…  Pour Bernard Bolze, à l’initiative de ce site, « La prison n’est pas une fatalité. Nous avons la conviction qu’un monde avec moins de prisons est possible. La torture et les traitements inhumains ne sont pas inévitables. Le respect de la dignité de chacun est le préalable à moins de violences. »   Cette initiative de Bernard Bolze, née à Lyon, se veut un centre de ressources et d’échanges et a pour objectif  d’informer et de témoigner sur les conditions de détention, pays par pays (une trentaine pour le moment) en français, en anglais et en espagnol. Une initiative à soutenir.

Jac FORTON

Prison Insider