Un processus de régularisation des migrants vénézuéliens en Équateur : une mesure humanitaire ou économique ?

Septembre de cette année, un projet de régulation de migrants vénézuéliens en Équateur est établi pour aborder leur processus de régularisation. Deux mois avant, l’Organisation Internationale pour les migrations (The International Organization for Migration, OIM) affirme que plus de 6,1 millions de réfugiés et de migrants ont quitté le Venezuela pour des raisons politiques, socio-économiques et de crise humanitaire en cours.

Photo : Hoy

Le Venezuela, riche en réserves pétrolières, en gaz et en ressources hydrauliques, est cependant un pays de pauvreté extrême en raison de sa dépendance vis-à-vis de son principal créancier, la Chine, des sanctions internationales et de l’absence de réformes économiques. Le régime autoritaire instauré par Hugo Chávez, président entre 1999 et 2013, et poursuivi par Nicolás Maduro, s’appuie sur le clientélisme, la corruption et une répression systématique de tout mouvement d’opposition.

Difficultés économiques et absence de liberté ont poussé les Vénézuéliens à quitter leur pays en masse. Le 31 mars 2021, l’IOM recense 4,6 millions de réfugiés et migrants venant du Venezuela, adultes et enfants. En juillet 2022, ils sont 1,5 millions de plus, en moins d’un an et demi. 60 % des adultes migrants sont célibataires, selon une information publiée sur la page web d’IOM du 6 novembre 2018. Cela veut dire que la population se vide de ses habitants mais encore que ces migrants constituent une force de production pour le pays qui les accueille et peuvent prétendre à fonder une famille ailleurs. Le désespoir les amène vers des contrées voisines ; ainsi la page web de la CNN du 22 décembre 2021 informe que les migrants vénézuéliens se trouvent majoritairement en Colombie (1,84 millions), au Pérou (1,29 millions), en Équateur (508 900), au Chili (448 100) et au Brésil (261 400). Nous ne citons que les cinq pays ayant reçu le plus de migrants vénézuéliens. 

La question de la gestion de la migration vénézuélienne est devenue un enjeu politique dans les pays d’accueil, où le pourcentage de ces migrants ne cesse d’augmenter, atteignant jusqu’à 2,88 % de la population totale en Équateur. Face à cette situation, Le gouvernement du président équatorien Guillermo Lasso vient de lancer un projet de régularisation des migrants vénézuéliens qui est détaillé par Sandra Molina, Ministre adjointe à la sécurité, dans une interview publiée en ligne le 10 septembre par Fernando Medina, du quotidien de Quito El Comercio.

Le processus de régularisation prendra un an, du 1er septembre 2022 au 15 août 2023. Il implique le ministère de l’Intérieur, le ministère des Affaires Étrangères, le Registro Civil ou Office de l’État civil, et le ministère de l’Inclusion économique et sociale. L’objectif est de gérer le flux migratoire au niveau national et international, d’octroyer une reconnaissance identitaire aux migrants installés sur le sol équatorien et, par conséquent, leur permettre d’avoir accès à un travail dans une économie formelle, pour ainsi s’intégrer dans le tissu social équatorien. On peut remarquer que c’est presque exactement ce qui avait été fait il y a vingt ans pour les Équatoriens qui avaient migré en masse en Espagne juste après la dollarisation de janvier 2000. Un an après, 20 789 Équatoriens en Espagne, selon les informations du journal El País (9 avril 2001), étaient régularisés quand bien même ils n’avaient pas encore d’offre de travail.

La ministre Molina indique, d’après les chiffres de l’Agence de l’ONU pour les Réfugiés (ACNUR), que les migrants entrés légalement en Équateur sont au nombre de 757 063, dont environ 363 000, près de la moitié, sont Vénézuéliens. Les migrants vénézuéliens entrés clandestinement en Équateur seraient environ 302 000. Le processus, précise Sonia Molina, s’adresse à tout migrant entré en Équateur, que ce soit légalement ou illégalement. Il commence par la remise d’une « attestation de séjour migratoire », première étape du processus. Entretemps un extrait de casier judiciaire délivré par le pays d’origine sera demandé, ainsi qu’un casier vierge en Équateur. Le gouvernement de Guillermo Lasso annonce, qu’une fois terminé ce processus en août 2023, il procèdera à la déportation des Vénézuéliens n’ayant pas entamé leur régularisation. Que verrons-nous d’ici un an ?

Marlène MORET