Le 6 février 2018, le Ministre péruvien des Affaires Étrangères, Jorge Arreaza, avait annoncé que le président vénézuélien Nicolás Maduro participerait au Sommet des Amériques de Lima afin de défendre la souveraineté des pays d’Amérique Latine et des Caraïbes, et de se rapprocher du peuple péruvien. Mais au vu des relations tumultueuses entre Lima et Caracas, et des nombreux questionnements sur la légitimité de Maduro, ce dernier a -t-il sa place au Sommet ?
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Le chef d’Etat péruvien, Pedro Pablo Kuczynski, avait cordialement invité Maduro à participer à cette rencontre entre chefs d’État et gouvernements du continent qui se tiendra les 13 et 14 avril prochains. Mais par la suite, les députés de Peruanos por el Kambio et les partis politiques de gauche Nuevo Perú et Frente Amplio ont défendu une motion qui vise le président du Venezuela et le qualifie de « persona non grata ». Des courriers — contenant les arguments destinés à convaincre le Groupe de Lima de prendre des mesures afin d’éviter la venue du dirigeant en question – leur ont été remis. Fuerza Popular, Acción Popular et Peruanos por el Kambio soutiennent la requête, qui demande également le procès et le jugement par la Cour Pénale Internationale du chef d’État vénézuélien. « Cette motion témoigne d’une réelle préoccupation et d’un refus de ce qui se passe au Venezuela, où citoyens et leaders politiques sont systématiquement victimes de violations des droits humains. »
Nicolás Maduro, a finalement annoncé le jeudi 15 février qu’il serait bien présent au Sommet des Amériques les 13 et 14 avril, malgré le refus de plusieurs chefs d’Etat. « On ne veut pas me voir à Lima, tant pis, ils me verront, qu’il neige, qu’il pleuve ou qu’il vente. » a-t-il menacé. L’alliance des pays du Groupe de Lima a exhorté le régime à présenter un nouveau calendrier électoral. Mais le dirigeant vénézuélien a annoncé qu’il ne respecterait pas cette demande, et a averti que les élections auraient lieu le 22 avril prochain dans son pays, avec ou sans l’opposition. Un représentant du parti de l’opposition, la Table de l’Unité Démocratique [MUD au Venezuela], a signalé qu’il était disposé à aller au scrutin, mais en conditions de transparence et accompagné d’observateurs internationaux.
Neutralisés ou exilés
Les principaux leaders de l’opposition sont restés en-dehors du jeu politique, après avoir été rendus impuissants, exilés ou emprisonnés. C’est le cas de Henrique Capriles, par deux fois candidat aux élections présidentielles ; de Leopoldo López, fondateur du parti Voluntad Popular (VP) et incarcéré sur ordre du gouvernement ; d’Antonio Ledezma, ancien maire de Caracas, qui a fui à l’étranger après une tentative d’arrestation à son domicile en novembre dernier.
Le régime de Maduro a également supprimé toute dissidence au chavisme. Rafael Ramírez, ancien ministre des Énergies et du Pétrole, et ancien président de PDVSA [compagnie pétrolière publique], affirme être poursuivi pour corruption suite à de nombreux désaccords avec le successeur d’Hugo Chávez. Miguel Rodríguez Torres, ancien employé du Ministère de l’Intérieur et de la Justice, a été neutralisé pour s’être porté candidat aux élections présidentielles. Maduro a ainsi recréé une scène sans adversaires politiques forts, avec un Conseil National Électoral complaisant envers son gouvernement, et avec la totalité des pouvoirs entre ses mains.
L’OEA (Organisation des Etats Américains), à l’origine du Sommet et dont le but est de défendre la démocratie et les droits de l’Homme, saura-t-elle prendre position face à cet homme de pouvoir que rien ne semble arrêter ?
Marine THIAM
Synthèse à partir des articles de La República (Uruguay) et d’El País.