Au cinéma, l’été aux couleurs latinos après « Viva » le nouveau film de la brésilienne Anna Muylaert

Chaque année l’été voit sortir nombre de reprises et nombre de films à diffusion réduite. C’est ainsi qu’en ce mois de juillet, on peut voir sur les écrans Truman et Viva ! depuis le 6 ; depuis le 13, L’Olivier, la reprise de Mémoires du sous-développement. Ce mercredi 20, c’est au tour du beau film brésilien D’une famille à l’autre d’être sur les écrans, ainsi que le film allemand Colonia sur la colonie dirigée par un ancien nazi en Argentine et qui servit de lieu de détention et de torture du régime Pinochet (Voir article dans cette newsletter). Est annoncé le 27 juillet le grand prix d’Annecy 2013, Rio 2026, une histoire d’amour et de furie de Luiz Bolognesi.

D’une famille à l’autre, film brésilien d’Anna Muylaert

A São Paulo, Felipe profite de sa fin d’adolescence dans les fêtes branchées. Sa mère, qui l’élève seule avec sa jeune sœur, lui laisse une grande liberté. Sauf que leur mère n’est pas leur mère : un test ADN prouve qu’elle les a enlevés à la naissance. Séparés, les enfants sont précipités dans leur vraie famille. Les parents biologiques de Felipe, à sa recherche depuis 17 ans, se retrouvent face à un adolescent  qui ne partage pas tout à fait leur conception de la vie…

D’une famille à l’autre (Mãe Só Há Uma) est le cinquième film d’Anna Muylaert, après le succès l’an passé d’Une seconde mère. Il s’agit ici d’une « Forme d’affirmation de l’individualisation, de l’identité et de l’individu comme elle l’affirme. L’origine du film est l’affaire célèbre au Brésil  d’une femme ayant volé trois enfants à la maternité et qui a dû les restituer des années plus tard. (Il s’agit du cas Wilma/Pedrinho  qui n’a été résolu qu’en 2002, 16 ans après les enlèvements). Ce personnage de criminel et de mère aimante a toujours fasciné les auteurs et a, par le passé, inspiré des films et des telenovelas au Brésil. Mais personnellement j’ai toujours été intriguée par le personnage du fils – qui perd brutalement tous ses repères et doit se construire une nouvelle identité. Que ressent-il ? Comment se voit-il ? Ce choc terrifiant de quitter l’adolescence et de commencer la vie adulte est la base de ce film ».

Ce film très court est parfaitement réussi. Le portrait de Felipe (Pierre dans sa vraie famille) n’est jamais exagéré. Il se sent un peu étranger partout et sa vraie famille a beaucoup de mal à accepter les tendances de ce fils inconnu. De plus la réalisatrice a eu la bonne idée de faire interpréter les deux mères par la même très bonne actrice, Dani Defusi.

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Viva !, réalisé par Paddy Breathnach

Qu’est-ce qui a pris à un cinéaste irlandais Paddy Breathnach d’aller tourner à Cuba son neuvième film, un mélodrame latino. Bien sûr Wim Wenders, Laurent Cantet ou quelques autres ont déjà filmé La Havane et ses murs lépreux, mais ils prenaient appui sur des scénarios écrits par des Cubains comme Leonardo Padura.

« J’ai eu envie de faire “Viva !” après avoir vu plusieurs spectacles de drag-queens à La Havane. Au beau milieu de nulle part, un drap tendu au fond d’un jardin et une simple lampe suffisaient à créer un théâtre et un monde de rêves. Le pouvoir de la transformation et de la création était guidé par le désir d’exprimer son identité d’une voix brute, imperturbable. C’était enivrant. J’ai souhaité amener ce ton romantique, plein de vie, dans un univers cinématographique naturaliste. Lorsque j’ai découvert la grande richesse des acteurs cubains, cela m’a permis de pousser ce mélange d’émotions exubérantes, d’authenticité, d’esthétique et de naturalisme encore plus loin ». 

C’est vrai que Jorge Perugorria, que l’on avait découvert dans Fraise et chocolat et qui jouait aussi dans Retour à Ithaque, et Luis Alberto Garcia vu dans La vida es silbar ou 7 jours à La Havane sont d’immenses acteurs. Le premier, ancien boxeur juste sorti de prison est le père de Jesus interprété remarquablement par Hector Medina ; il ne veut pas que son fils joue dans les cabarets de travestis. L.A. Garcia est Mama qui dirige le cabaret et qui avait embauché Jesus pour coiffer les perruques. Jesus n’est pas de ceux qui crient, n’a rien d’excessif. Son énergie, il la garde pour la scène.

Est-ce l’apport du coté irlandais, la mise en scène est sensible et mesurée, face à l’énergie des acteurs cubains toujours en représentation sur scène ou dans leurs habitations ouvertes à tous les courants d’air et à la pluie.

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Alain LIATARD