Le président Luis Abinader a émis un avertissement particulier à la communauté internationale depuis la tribune des Nations Unies face à l’indifférence des pays du monde à son appel à financer la mission de paix pour Haïti. Dans une déclaration à la presse après son discours devant le Conseil de sécurité de l’ONU, le président dominicain a adressé un message énergique à la communauté internationale.
Photo : ONU Press
« Aujourd’hui, je veux avertir la communauté internationale que la République dominicaine continuera à lutter de toutes ses forces pour éviter d’être entraînée dans le même abîme qu’Haïti. Notre devise, à partir de maintenant, sera : soit nous luttons ensemble pour sauver Haïti, soit nous luttons seuls pour protéger la République dominicaine« , a averti le chef de l’État. Abinader a ajouté que son pays est contraint « de prendre cette mesure face au tournant qu’a pris la situation interne en Haïti avec l’entrée de nouveaux acteurs paramilitaires qui aggravent encore plus le conflit existant« . Le président a exhorté avec véhémence les dirigeants du monde à « verser l’argent maintes fois promis » et à remplacer les promesses par des actions. « La République dominicaine ne donne pas à Haïti ce qu’elle a en surplus, mais apporte ce qui lui manque. Le temps des promesses est terminé, à partir d’aujourd’hui, nous entrons dans le temps des actions. L’argent est attendu maintenant sinon le préjudice à Haïti sera irréversible. Ce préjudice serait une menace pour nous et pour la région« , a déclaré Abinader.
Les paramilitaires aggravent la crise Le président dominicain a insisté à plusieurs reprises sur l’aggravation de la situation d’insécurité en Haïti qui a donné naissance à des mouvements paramilitaires, tels que celui de Guy Philippe. « Le résultat est qu’aujourd’hui, Haïti, avec une grande partie de son territoire contrôlé par des bandes criminelles, est au bord d’une guerre civile. Ces groupes paramilitaires et politiques se présentent comme des rédempteurs devant un pays qui aspire à la sécurité, à la nourriture et à la paix« , a-t-il souligné.
Abinader a reproché à la communauté des pays représentés à l’ONU leur « indifférence » face à la situation, de plus en plus grave, de la société haïtienne. « Depuis septembre 2021, notre gouvernement dénonce devant divers organes des Nations Unies la détérioration continue des conditions sociales avec Haïti. Malheureusement, la grave situation dans le pays voisin n’a pas été traitée avec l’urgence et la fermeté qu’elle mérite », a-t-il critiqué. Il a ensuite déclaré à la communauté internationale qu’elle ne pouvait pas permettre que la tragédie haïtienne se poursuive un jour de plus. « Ce Conseil a approuvé la force multinationale de soutien à Haïti, un embargo sur les armes et a imposé des sanctions, cependant, nous n’avons pas agi avec la force et l’urgence nécessaires pour déployer cette mission ou lui donner la robustesse que le régime de sanctions exige », a interrogé le dirigeant dominicain.
Concernant le changement climatique et la sécurité alimentaire, Abinader a déclaré qu’ils sont intrinsèquement liés et qu’il n’est pas possible d’en aborder un sans prêter une attention appropriée à l’autre, surtout lorsque cela se produit dans des situations de conflits armés.
Presque en même temps qu’Abinader, des autorités du Kenya, des États-Unis et d’Haïti se sont réunies pour peaufiner le processus de déploiement de la mission de sécurité en Haïti. Selon les informations fournies par le média haïtien Ma Radio FM, la réunion a été animée par le directeur de la police nationale d’Haïti, Frantz Elbé. Un rapport du journal Le Nouvelliste indique que la ministre de la Justice et de la Sécurité publique, Emmelie Prophète, a dirigé la délégation haïtienne composée du directeur de la police et de trois inspecteurs généraux de cette institution. Pendant ce temps, la délégation du gouvernement kenyan a été dirigée par l’adjoint à la sécurité nationale, Joseph Boinett. « Cette réunion permettra de planifier l’arrivée de la Mission. Nous examinons toutes les questions pour lesquelles nous pouvons trouver des réponses, tous les problèmes qui existent avant le déploiement« , a indiqué le journal.
Un tribunal kényan a bloqué le plan et l’a qualifié d’ « inconstitutionnel, illégal et invalide » de la part du gouvernement qui cherche à déployer un millier de policiers à Haïti, en proie à la violence des bandes, dans le cadre d’une mission soutenue par l’ONU. Le président du Kenya, William Ruto, a déclaré que son pays poursuivra ses plans pour diriger la mission de sécurité approuvée par le Conseil de sécurité de l’ONU en Haïti malgré la décision judiciaire.
D’après Diario Libre (République dominicaine)
Traduit par Carla Estoppey