Cecilia Vicuña, artiste chilienne, reçoit le Lion d’or pour l’ensemble de sa carrière lors de la Biennale de Venise. Prix partagé avec Katharine Fritsch

Les artistes chilienne et allemande, Cecilia Vicuña et Katharina Fritsch, verront l’ensemble de leurs carrières récompensées par le Lion d’or lors de la 59e Exposition internationale d’Art de la Biennale de Venise. Elle s’intitule « The Milk of Dreams » et se tiendra au Giardini della Biennale et à l’Arsenale de la ville italienne du 23 avril au 27 novembre 2022.

Photo : Venice festival

La décision a été approuvée par le conseil d’administration de la Biennale présidé par Roberto Cicutto, à la suite d’une proposition faite par la Commissaire de l’Exposition, Cecilia Alemani. La cérémonie de remise des prix ainsi que l’inauguration de l’Exposition auront lieu le 23 avril prochain, à Ca’Giustinian, siège de la Biennale.

« Vicuña est une artiste et une poétesse. Elle a dédié de nombreuses années à un travail inestimable de préservation d’œuvres de beaucoup d’écrivains latino-américains. Elle a traduit et édité des anthologies de poésie qui, sans cela, se seraient perdues à jamais. Vicuña est aussi une activiste qui a longtemps lutté pour les droits de peuples d’indigènes au Chili et dans le reste de l’Amérique latine. Dans les arts visuels, son travail s’étend du domaine de la peinture jusqu’à celui de la performance, en passant par des installations complexes », a affirmé à l’écrit Cecilia Alemani.

« Son langage esthétique se fonde sur une fascination profonde pour les traditions indigènes et pour les épistémologies non occidentales. Vicuña a parcouru pendant des décennies son propre chemin, obstinément, avec humilité et de façon méticuleuse ; elle a imaginé de nouvelles mythologies personnelles et collectives, puis ses questionnements annoncent déjà les nombreux débats écologistes et féministes récents. Plusieurs de ses installations sont faites avec des objets trouvés et des matériaux de récupération qui s’entremêlent en de délicates compositions où le microscopique et le grandiose semblent trouver un équilibre fragile : il s’agit d’un art précaire à la fois intime et puissant. »

Le titre de la 59e Exposition d’Art « The Milk of Dreams » [Le lait des rêves] est une expression empruntée à un livre de Leonora Carrington (1917-2011) où l’artiste surréaliste décrit un monde magique où la vie est constamment remise en question à travers le prisme de l’imagination. C’est un monde où quiconque peut changer, se métamorphoser et devenir quelqu’un ou quelque chose d’autre. En s’inspirant de la sensibilité et des questionnements de Carrington, Alemani propose trois aires thématiques pour l’Exposition de la Biennale : la représentation des corps et leurs métamorphoses ; la relation entre les individus et les technologies ; la connexion entre les corps et la Terre. Il est important de noter que pour la première fois dans les 127 années d’histoire de la Biennale, celle-ci accueille une majorité d’artistes femmes, mais compte aussi des artistes non binaires et « gender fluid ». Ce constat permet de remettre en question la centralité de l’homme dans l’histoire de l’art et dans la culture contemporaine.

« C’est pour moi un grand honneur de recevoir le Lion d’or dans un moment où l’humanité essaye de maintenir la paix et la justice contre vents et marées » a déclaré Cecilia Vicuña. « Je crois que notre art et notre conscience peuvent avoir un rôle important dans l’élimination urgente de la violence et de la destruction, afin de sauver notre environnement du collapse imminent. »

« Venise m’est particulièrement chère. Certains de mes ancêtres paternels qui sont arrivés au Chili au XIXe siècle étaient originaires du nord de l’Italie. J’ai donc appris depuis que j’étais petite à apprécier leur histoire et leur art. Mes grands-parents seraient très honorés de me voir avec ce prix. Mon lignage maternel est d’origine indigène, je suis donc très fière de faire partie de la Biennale de Venise organisée par Cecilia Alemani qui place au-devant de la scène des “artistes qui imaginent une condition post-humaine s’affronter à une condition occidentale qui utilise l’homme blanc comme la mesure de toute chose.” Se joint à moi un groupe extraordinaire d’artistes qui partagent l’esprit de The Milk of Dreams. Nous devons absolument trouver une nouvelle forme d’habiter cette Terre. »

Revista Artishock
Traduit par Tomas Torres