« La Hija de todas las rabias » de la Nicaraguayenne Laura Baumeister en salle cette semaine

La fille de toutes les colères, un film de fiction, tourné au Nicaragua en co-production avec plusieurs pays dont le Mexique et la France. La réalisatrice, très douée pour les images, a mis toutes ses colères mais aussi une réalité tout en puisant dans l’onirisme et les rêveries surréalistes.

Photo : Allociné

Maria et sa mère Lilibeth vivent dans la précarité au bord de la plus grande décharge du Nicaragua. Un jour, la petite fille ne voit plus sa mère revenir. Elle entame un dialogue avec un nouvel ami, Tadeo, qui l’aidera à dépasser sa peur et sa rage. À travers la magie des rêves, elle cherchera à retrouver sa mère. « Le point de départ du film, explique la réalisatrice Laura Baumeisterfut un endroit très important : La Chureca, la plus grande décharge à ciel ouvert du Nicaragua. J’y étais déjà allée quand j’étais adolescente et je n’ai jamais pu l’oublier. Le contraste entre les montagnes de déchets et l’un des plus beaux paysages de mon pays natal (la côte du lac Xolotlán et ses reliefs montagneux) m’a profondément choquée, ce qui causa le début d’une longue réflexion. Un autre aspect qui m’a beaucoup touchée était les locaux, ceux qui vivent sur la décharge. Plus particulièrement leur capacité, cette énergie créative, à se réapproprier et à réinterpréter les objets pour leur donner une seconde vie(…) Lorsque vous vous trouvez au milieu d’une décharge qui a généré des montagnes d’ordures (plus hautes que les montagnes naturelles) et que vous ne pouvez pas voir au-delà, il devient évident que si nous ne faisons rien pour arrêter les niveaux de consommation et la surproduction, nous irons tous en enfer. Pour moi, c’est un fait, et c’est pourquoi il était très important que cet endroit soit montré. »

Le film commence par un plan magnifique : une montagne d’ordures d’où surgissent une dizaine d’enfants qui vont trier les déchets. Puis nous prenons connaissance de María, âgée d’une douzaine d’années. Nous découvrons son amour des chiots que sa mère va vendre. Lorsque Lilibeth doit fuir, elle confie María à un ferrailleur qui fait travailler des enfants. Mais le temps lui dure.

« Elle ne veut pas être étiquetée comme une orpheline ou une fille abandonnée, explique la réalisatrice, alors elle invente une histoire où sa mère ressemble à un félin. Est-ce que cela lui fait quand même mal, est-ce qu’elle ressent encore la perte ? Bien sûr. Mais elle pourra aussi vivre avec cette blessure. Pour guérir, elle imagine que sa mère s’est transmutée, qu’elle est une autre chose vivant dans le royaume des rêves. » Laura Baumeister a remarquablement dirigé María et les autres enfants. Elle a su aussi utiliser le bruit du vent mêlé à la musique.

 C’est le premier long métrage de Laura Baumeister, réalisé avec beaucoup de difficulté. Et aussi le cinquième film de fiction de l’histoire du Nicaragua, le premier à être réalisé par une femme nicaraguayenne. À découvrir depuis cette semaine.

Alain LIATARD

La hija de todas las rabias de Laura Baumeister de Monts avec Ara Alejandra Medal, Virginia Raquel Sevilla García. Nicaragua, 1 h 30.