Alejandro Jodorowsky, 90 ans pour cet artiste franco-chilien hors-normes

Alejandro Jodorowsky Prullansky est né le 17 février 1929 à Tocopilla, au Chili, où ses parents, juifs russes fuyant les pogroms s’étaient réfugiés. Cet artiste franco-chilien est surtout connu pour ses scenarii de science-fiction en bande-dessinée, son cinéma surréaliste iconoclaste et sa passion pour le tarot divinatoire. Acteur, mime, romancier, essayiste, poète, scénariste, réalisateur et auteur de performances artistiques, «Jodo» touche à tout et souffle ce mois-ci ses 90 bougies.

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Après avoir étudié la philosophie et la psychologie, il s’oriente vers une carrière artistique qui débute véritablement en France avec la rencontre, en 1953, du mime Marceau pour lequel il commence à travailler, créant des célèbres pantomimes comme La Cage. Il fonde en 1962 le mouvement faussement surréaliste Panique en compagnie de Roland Topor et Fernando Arrabal, coupables complices de performances décalées et dérangeantes, frisant la pornographie.

En 1965, au Mexique, il crée le Théâtre d’Avant-Garde, montant des pièces de Beckett, Ionesco et Strindberg. Se tournant vers le cinéma, il fonde la société Producciones Pánicas et son premier long-métrage, adapté d’une pièce d’Arrabal, fait scandale lors de sa présentation au Festival du Film français d’Acapulco. Faisant fi des nombreuses menaces qui pèsent sur lui, il réalise en 1970 un western psychédélique, El Topo, qui devient un film culte dans les milieux underground. Encouragé par John Lennon, il réalise ensuite La Montagne sacrée, errance mystique d’un vagabond aux faux airs de Jésus.

De retour en France en 1975, il ambitionne d’adapter au cinéma le célèbre roman de science-fiction Dune de Frank Herbert mais, faute de moyens, le projet, produit par Michel Seydoux, n’aboutit pas, malgré les promesses de collaborations de Salvador Dalí, Orson Welles, David Carradine, Amanda Lear et Mick Jagger (pour le casting), Hans Ruedi Giger (effets spéciaux), Mœbius (story-board et costumes), Pink Floyd et Magma pour la musique (rien que ça !). Ainsi portée, l’aventure n’en a pas moins influencé toute la production cinématographique de science-fiction qui allait suivre, depuis Alien à Matrix en passant par Blade Runner et bien sûr la saga Star Wars.

Jodorowsky s’oriente alors vers la bande-dessinée et collabore notamment avec Mœbius, proposant dès 1980 la série L’Incal dans le mensuel Métal Hurlant. Le jury du festival de BD d’Angoulême le consacre en 1996, lui décernant l’Alph’Art (grand prix) du meilleur scénario pour la série Juan Solo avec le dessinateur Georges Bess.

En 1989 et 1990, il accepte pour la première fois les contraintes des producteurs d’Hollywood avec les longs-métrages Santa sangre puis Le Voleur d’arc-en-ciel. Il continue en parallèle avec sa passion pour le Tarot de Marseille dont il est un spécialiste, maître de conférences hebdomadaire et inventeur du concept de «psycho-magie». En outre, il publie régulièrement romans et recueils de poèmes.

Plus récemment, il est passé par internet afin de financer son film La danza de la realidad, autobiographie sortie en 2013 et tournée dans son village natal ; la suite, Poesía sin fin, a été présentée à la Quinzaine des Réalisateurs du Festival de Cannes en 2016.

Ce dimanche 17 février, «Jodo» a fêté ses 90 ans et 2019 sera certainement riche en événements culturels le concernant et dont nous vous tiendrons au courant. Côté BD, à noter la réédition en 12 volumes de l’intégrale de ses différentes collaborations en tant que scénariste (avec Mœbius, Arno, Silvio Cadelo, Juan Giménez, Georges Bess, Jean-Claude Gal, Milo Manara…) aux éditions Les Humanoïdes Associés, la sortie du troisième tome étant prévue pour la fin du mois.

Bon anniversaire «Jodo» !

Fabrice BONNEFOY