SYNOPSIS

Le panorama auquel les Vénézuéliens sont confrontés en matière de santé est présenté dans « Tout va bien », de Tuki Jencquel (Caracas, 1974). Le documentaire, filmait entre mai de 2016 et août de 2017, montre les témoignages de patients, de personnels de santé, de bénévoles qui aident à connecter ceux qui ont besoin de médicaments et de pharmaciens sur la situation des services de santé, l’accès aux médicaments et aux traitements. Une approche du point de vue humain à l’état d’urgence dans lequel se trouve la santé publique et qui dépeint la résilience avec laquelle chacun fait face à la situation.

Venezuela / 60 min 
Thématique : EXIL / SANTÉ / MIGRATION 

L’effondrement du système de santé publique vénézuélien à travers les témoignages d’une pharmacienne, d’un traumatologue, d’un activiste social et de deux malades du cancer : c’est le point de départ de ce film documentaire du réalisateur, Tuki Jencquel. « Il me semblait important de faire un documentaire sur ce qui se passait après 2015, date à partir de laquelle avait commencé la chute vertigineuse du Venezuela dans tous les sens, notamment au niveau des revenus et du cours de pétrole. En face d’une crise d’une telle ampleur, j’ai décidé que je voulais me concentrer sur un seul sujet et c’était l’aspect de la pénurie de médicaments, un des plus douloureux de la crise, en plus de la pénurie alimentaire, qui s’est aggravée les années suivantes, » raconte Jencquel. Ce film traite des inégalités et de la pénurie de médicaments, dans un pays qui, pendant des décennies, était connu dans la région pour avoir l’un des meilleurs systèmes de santé publique. Les personnages, tous de la classe moyenne, avaient autrefois un niveau de vie élevé et voyageaient à l’étranger. Ils se trouvent, aujourd’hui, dans une situation de pauvreté, de précarité absolue selon les explications du réalisateur. « Cela me paraissait donc important de montrer qu’au Venezuela, la pauvreté n’était pas seulement le problème d’une certaine classe sociale, mais qu’elle englobait fondamentalement presque toute la société ».

Tuki Jencquel entreprend ce projet pour sensibiliser et informer les personnes sur une question essentielle, avec un format qui lui permet de prendre son temps pour créer de l’empathie avec les personnages, travailler à partir des émotions qui sont, à son avis, des outils très puissants du cinéma documentaire. Le résultat est un film avec une structure qui comprend des témoignages et des situations réelles mais qui incorpore aussi la dramatisation comme une catharsis dévoilant des moments plus intimes de la vie de chaque protagoniste. « La décision de le faire comme ça était venue, fondamentalement, d’un moment de prise de conscience, qui au Venezuela existait, et existe toujours, mais à ce moment-là, surtout, il y avait un déni absolu de la crise par le parti au pouvoir. Le discours officiel du gouvernement à l’époque était qu’il n’y avait pas de crise. Qu’il n’y avait pas de pénurie de médicaments, qu’il n’y avait rien dont la population souffrait. Ce déni me semblait si grotesque que je voulais le dépeindre dans le documentaire ». Au lieu de confronter et de mettre les porte-parole dans le récit, comme une juxtaposition de la version officielle contre la réalité, Jencquel avait décidé d’une solution bien plus ludique. « L’idée est venue que oui, eh bien, si au Venezuela ‘‘tout va bien’’ comme le dit le titre, qui est aussi un jeu avec cette négation, alors les Vénézuéliens doivent être des acteurs extraordinaires. C’est comme ça qu’on rentre dans l’univers intime des protagonistes, telle Rebeca qui lutte contre le cancer… la dramatisation permet de partager leurs émotions pures détachées de la scénographie de la réalité. La dramatisation peut déclencher des effets secondaires, c’était un processus guidé par une psychologue spécialisée, donc c’était vraiment une séance de psychodrame qui s’est concrétisée dans le film », explique le réalisateur. Avec Tout va bien, Tuki Jencquel garde une trace des histoires de vie des Vénézuéliens qui ont dû, malheureusement, quitter leur pays. Le cas de Rebeca est pour le réalisateur le plus marquant, puisqu’elle est décédée, en 2019, pour la raison même qu’elle n’a reçu aucun traitement.

Marcelino PACHECO

Né à Caracas en 1974, Tuki Jencquel a étudié le cinéma à la NYU, Tisch School of the Arts, et a ensuite obtenu un Master of Business Administration de l’IESA, Caracas. Il est le réalisateur de deux courts métrages et d’un moyen métrage documentaire, Sin Ti Contigo, qui a remporté le prix Feisal au Festival international du film de Guadalajara en 2011. Il réalise actuellement son prochain documentaire, un portrait intime de sa mère, connue en France pour son combat en faveur de la légalisation du suicide assisté.