La Covid-19 oblige les Boliviens à reporter la date des élections générales prévues en septembre

En Bolivie, selon les scientifiques, le pic épidémique devrait avoir lieu début septembre. Jeanine Áñez, la présidente par intérim depuis le 12 novembre dernier, plaide pour un report du scrutin avec un premier tour en octobre et le deuxième tour un mois plus tard.

Photo : La Tercera

L’épidémie de Covid-19 poursuit sa progression, avec plus de 1 000 nouveaux cas recensés dans les dernières 24 heures, et un record de 79 nouveaux décès. Le total des personnes infectées s’élève à plus de 65 000, dont 2 407 décès. Ces données doivent toujours être analysées à la lumière du faible nombre de tests réalisés (environ 12 000 par million d’habitants, l’un des taux les plus faibles d’Amérique du sud), ce qui minimise l’ampleur de la crise.

Le département le plus touché reste Santa Cruz, qui concentre 49 % des cas (31 656), mais les plus fortes hausses quotidiennes sont désormais enregistrées à La Paz (11 943, 18 %). Suivent Cochabamba (7 047, 11 %), le Béni (5 193, 8 %), Tarija (2 594, 4 %), Oruro (2 506, 4 %), Chuquisaca (1 736, 3 %), le Pando (1 311, 2 %) et Potosí (1 266, 2 %). Les dernières estimations du ministère de la Santé prévoient un pic début septembre, avec près de 130 000 cas sur l’ensemble du territoire national.

Le gouvernement bolivien a annoncé faire partie d’une liste de 75 pays éligibles à l’acquisition à coût réduit du vaccin ChAdOx1 n CoV-19, développé par l’Université d’Oxford et actuellement en phase d’essai au Royaume-Uni, au Brésil et en Afrique du Sud. Cette information a été confirmée cette semaine par l’ambassadeur du Royaume-Uni à La Paz via plusieurs médias.

Élections à nouveau reportées, conflits à venir ? 

Sur la base d’expertises scientifiques prédisant la hausse de l’épidémie de Covid-19, et face aux revendications des partis du centre et de la droite ainsi qu’au scepticisme grandissant de l’opinion publique (64 % soutiendrait le report des élections, selon un sondage paru cette semaine), le Tribunal Suprême Électoral (TSE) s’est déclaré ce jeudi favorable à un nouveau report de la date du premier tour des élections générales au 18 octobre (deuxième tour éventuel le 29 novembre). Selon le président du TSE Salvador Romero, cette décision n’a cette fois pas fait l’objet d’un accord politique entre les candidats en lice pour les prochaines élections, et peut se passer de l’aval du pouvoir législatif dans la mesure où l’organe électoral fait autorité en la matière. Le TSE justifie cette décision avant tout par le danger d’une faible participation et l’incertitude entourant le maintien des missions d’observation électorale.

Notons que le comité scientifique national, dépendant du ministère de la Santé, s’était montré pessimiste quant à la faisabilité du scrutin le 6 septembre, avant que certains tribunaux électoraux départementaux ne jugent la journée de vote compromise en raison de la situation épidémiologique dans leur circonscription. 

Par ailleurs, le TSE s’est dit inquiet de la forte « polarisation » politique autour de ce sujet, dans la mesure où certains comités civiques s’étaient récemment joints aux appels des candidats du centre et de la droite, qui militaient déjà pour un nouveau report du scrutin avant la fin de l’année 2020. Notons en outre que Carlos Mesa (Comunidad Ciudadana, alliance de centre droit), d’abord réticent du fait de sa bonne position dans les enquêtes d’opinion, a finalement annoncé qu’il soutenait ce report. De son côté, la présidente Jeanine Áñez avait également appelé le MAS (Mouvement vers le Socialisme) à faire preuve de responsabilité et de sagesse sur ce dossier.

À l’heure actuelle, Evo Morales maintient sa volonté d’aller aux urnes le 6 septembre et indique qu’un nouveau report devrait à minima être avalisé par le Parlement (qui pour rappel est contrôlé aux deux tiers par le MAS). Il semble qu’il puisse encore compter sur l’appui des hautes sphères de son parti et le soutien sans faille de nombreuses organisations sociales et des syndicats cocaleros du Chaparé, qui ont à nouveau agité la menace de mobilisations. Notons toutefois que plusieurs parlementaires massistes et certaines antennes régionales du parti se sont montrés favorables à un report des élections et ont appelé la gouvernance du MAS à être « raisonnable ». 

Claire DURIEUX