Au Brésil, les producteurs de maïs appellent à la prudence dans le conflit États-Unis/Iran par peur des sanctions

Les producteurs de maïs du Brésil appellent à la prudence dans le conflit entre les États-Unis et l’Iran par peur des sanctions que le pays nord-américain pourrait appliquer au pays persan, ce qui compliquerait encore plus les exportations de cette céréale, la principale ressource que le pays sud-américain exporte en Iran.

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« Nous avons déjà eu un problème passé dû aux restrictions qui sont imposées à l’Iran dans le débat sur le problème nucléaire (…). Nous sommes inquiets que les restrictions puissent augmenter, et surtout qu’il y ait un embargo plus grand, c’est le moment de faire preuve de prudence », a commenté lors d’une interview avec Sputnik le président de l’Association Brésilienne de Producteurs de Maïs (Abramilho), Alysson Paolinelli.  Les exportations agricoles du Brésil vers l’Iran représentent 2,7% du total qu’il exporte dans le monde, mais dans le cas des céréales, et particulièrement du maïs, la dépendance est plus grande, et a augmenté ces dernières années. En 2016, le Brésil a exporté 4800 tonnes de maïs pour une valeur de 796 millions de dollars, mais l’an passé c’étaient déjà 5422 tonnes, l’équivalent de presque 1000 millions de dollars, d’après les chiffres officiels du Ministère de l’Agriculture. Au total, en 2019, le Brésil a exporté dans le monde 43200 tonnes de maïs (7344 millions de dollars). En termes monétaires, l’Iran représente approximativement un neuvième du total des exportations de cette céréale. 

Le marché brésilien impacté par la politique de Trump

Le représentant du secteur assure qu’il ne peut pas vérifier si l’actuel conflit avec les États-Unis a fait diminuer les exportations, étant donné qu’à cette période de l’année les envois sont peu fréquents, du fait des dures conditions climatiques de l’hiver iranien. Cependant, il remarque que la politique de sanctions a déjà provoqué plusieurs « situations inconfortables », puisqu’en dépit du fait que les sanctions, théoriquement, n’affectent pas les aliments pour ne pas porter préjudice à la population, le cadre légal n’est pas clair, le maïs s’utilisant aussi pour nourrir les animaux. 

À cause de cela, les producteurs brésiliens se sont vus obligés de recourir au troc pour éviter les prohibitions : ils importent de l’urée d’Iran (un fertilisant) et, en échange, ils envoient du maïs. Même ainsi, ce système a également dû surmonter des obstacles : au mois de juillet dernier, deux bateaux iraniens ont stationné pendant presque 50 jours devant la côte brésilienne, ce qui était sur le point de provoquer un conflit diplomatique. Les bateaux apportaient de l’urée au Brésil et pensaient rentrer avec un chargement de maïs, mais ils n’ont pas pu le faire parce qu’ils se sont retrouvés sans combustible, et l’entreprise pétrolière Petrobras refusait de les fournir, de peur d’être sujette à des sanctions aux États-Unis. Finalement, l’impasse s’est résolue lorsque le Tribunal Suprême Fédéral du Brésil a obligé l’entreprise à fournir les bateaux, avançant que l’entreprise brésilienne qui avait affrété les bateaux n’était pas sur la liste des agents sujets à des sanctions de la part des États-Unis. 

Le gouvernement brésilien en dilettante

Le gouvernement brésilien s’est maintenu au second plan dans cet épisode, mais il a montré une posture plus ferme récemment, après que les États-Unis ont tué le général iranien Oasem Soleimani, s’alignant entièrement avec l’administration de Donald Trump en ce qui concerne la lutte contre le terrorisme. Cela a provoqué un malaise chez les Iraniens, qui ont émis une requête à la représentante du Brésil à Téhéran ; toutefois, le porte-parole des exportateurs de maïs valorise positivement la gestion du conflit par le gouvernement de Jair Bolsonaro et ne craint pas un boycott de l’Iran sur les produits brésiliens. 

« La position brésilienne a été correcte, elle a maintenu une position de côté par rapport aux États-Unis » a déclaré l’ingénieur agronome, tout en soulignant que le Gouvernement souhaite continuer à faire du commerce avec tous les peuples de la région. Paolinelli valorise de façon particulièrement positive la ministre de l’Agriculture, Tereza Cristina de Costa, qui « aide à maintenir l’équilibre ». Ces derniers mois, la ministre s’est distinguée dans son rôle à l’heure d’apaiser les esprits entre les pays arabes (grands importateurs d’aliments brésiliens) après les déclarations ou les gestes du président Bolsonaro en faveur d’Israël et des États-Unis qui avaient causé un certain malaise. 

Lou BOUHAMIDI
D’après Sputnik Mundo