Le président nicaraguayen Daniel Ortega se fait rattraper par les acteurs internationaux

Le président Daniel Ortega continue à s’accrocher au pouvoir grâce au soutien des forces armées, de la police et des juges du pays, et ce malgré la pression de la rue, continuant ainsi une crise sociopolitique profonde et violente.

Photo : laprensa.ni

Après la répression virulente déployée contre les opposants au pouvoir, le mois de juin annonce un approfondissement de la crise économique pour la population avec, entre autres, une série de hausse de prix de biens de consommation, comme la suppression de subventions envers les secteurs économiques les plus vulnérables, ce qui risque de dégrader encore plus le climat social.

De plus, le 13 juin marque la date limite du délai de 6 ans établi par la clause 15.21 de l’accord-cadre de la loi dite du Grand Projet Océanique. En d’autres termes, ceci signifie la caducité de la concession du Grand Canal Interocéanique achetée par Wang Jing –l’entrepreneur du projet– et par conséquent son annulation de facto, laissé à l’abandon à cause de l’enlisement dans lequel le pays s’est enfoncé.

En outre, ce mois-ci, la pression politique internationale risque de sanctionner et ostraciser davantage encore le régime. L’investiture le 1er juin du président Bukele au Salvador voisin, élu en marge du bipartisme traditionnel, risque de modifier les rapports de force en Amérique centrale, et ce en défaveur d’Ortega.

De plus, le secrétaire d’État américain Mike Pompeo devra rendre le 21 juin un rapport concernant les actes d’atteinte aux droits humains, de corruption et de blanchiment d’argent par les fonctionnaires et des forces de l’ordre nicaraguayens. S’il considère que les avancements effectués sont insuffisants, de nouvelles sanctions pourront alors être appliquées, bien que la nature de celles-ci demeure vague. Au vu de l’ampleur de la répression menée depuis un an et du secrétisme adopté par le cercle proche du pouvoir, ce rapport risque de jouer en sa défaveur, d’autant plus que sa publication coïncide avec la libération des prisonniers politiques du pays. Il faut rappeler que le régime est particulièrement vulnérable face aux sanctions de l’administration étasunienne, qui ont déjà sévi sur Rosario Murillo (la première dame), des hauts fonctionnaires, ainsi que sur BanCorp, une institution bancaire pilier du régime.

Du 26 au 28 juin, la 49e Assemblée générale de l’Organisation des États Américains à Medellín pourraient, dans le cadre de l’article 21 de la Charte Démocratique Inter-Américaine, renvoyer le Nicaragua de cette même organisation régionale si le gouvernement ne respecte pas les accords signés lors du dialogue national. Ce renvoi impliquerait également une limitation des prêts de la Banque Interaméricaine de Développement, augmentant encore plus la pression financière dans le pays et le mécontentement social déjà au plus haut.

Malgré l’adversité à laquelle Ortega-Murillo et leurs proches font face, ils ne semblent pas être enclins à négocier une solution à la crise, de par l’emprise du FSLN (Front sandiniste de libération nationale, fondé en 1961) sur les institutions, de l’éventuelle intervention de l’administration étasunienne et des organisations régionales, et de l’usage tous azimuts de la répression par le gouvernement.

Alice DREILLARD