Texaco, et pourtant nous vaincrons, bande dessinée choc portée par Amnesty International

Texaco, et pourtant nous vaincrons livre le récit de l’une des plus grandes catastrophes écologiques et humaines de l’histoire en bande dessinée. Édité par Les Arènes BD et Amnesty International, cet ouvrage à trois voix réalisé par la journaliste Sophy Tardy-Joubert, l’Équatorien Pablo Fajardo et le dessinateur Damien Roudeau, est à découvrir, partager et faire connaître.

Photo : Les Arènes BD

Depuis 25 ans l’avocat équatorien Pablo Fajardo se bat contre l’industrie pétrolière texane Chevron. En 2001, cette entreprise racheta Texaco qui, entre 1967 et 1993, exploitât sauvagement l’or noir de ce bout d’Amazonie, laissant derrière elle une terre polluée par 70 millions de litres de résidus toxiques et une population plus qu’ailleurs affectée par les cancers de l’utérus, de l’estomac, des leucémies, fausses couches et malformations de nouveau-nés. Une condamnation à une amende record de 9 milliards de dollars en 2011 n’arrête pas le combat, la multinationale refusant de reconnaître ses torts, de s’acquitter du moindre centime et considérant la justice équatorienne incompétente en la matière.

À travers la bande dessinée, Pablo Fajardo raconte son histoire, depuis son enfance, puis son combat, assisté pour le scénario de la journaliste free-lance Sophie Tardy-Joubert (Les Petites Affiches, XXI, Elle, ARTE, France 3), lauréate en 2012 du Prix France 3 du meilleur reportage. Quant au dessin, il est confié à Damien Roudeau, illustrateur spécialisé depuis quinze ans dans le reportage graphique, en immersion, pour différentes associations et ONG et qui signe là sa première BD.

Né en 1971, dans la province de Sucumbios, région amazonienne de l’Équateur appelée «Oriente», Pablo Fajardo grandit avec la présence quotidienne de Texaco. Il travaillera d’ailleurs quelque temps pour l’entreprise. Il s’indigne alors de cette exploitation méprisant toutes les règles humanitaires, écologiques, politiques, éthiques ou tout simplement acceptables, sauf par des êtres sans états d’âme ni scrupules, rappelant les mouches de «La United Fruit Co» de Pablo Neruda dans son Canto General.

Aidé dans son enseignement par des pères franciscains puis avec leur soutien et celui de plus de 30 000 de ses compatriotes représentant les communautés amazoniennes concernées, il devient avocat et attaque la multinationale texane. Malgré les menaces du FBI, les intimidations, l’assassinat de son frère, l’affaire commence à faire du bruit, relayée dans les médias internationaux (Vanity Fair, Le Monde, El País, CNN). Certaines célébrités comme Brad Pitt, Angelina Jolie ou encore Sting, accompagnent le mouvement des «Afectados» ainsi nommé depuis 1993. Les prix CNN Hero en 2007 et Goldman en 2008 (l’équivalent d’un Nobel de l’écologie) confirment l’empathie pour ce désastre méconnu et étouffé depuis des décennies jusqu’à la condamnation historique de 2011.

Le récit est prenant, chronologique, alternant sur 132 pages les planches colorées aux cadrages divers et les grandes illustrations à l’aquarelle. Il est agrémenté d’un dossier reprenant les faits, l’histoire du procès toujours en cours et le portrait de ses principaux protagonistes. Les pages de garde, reproduisant une carte du District de l’Audience de Quito de 1779, raviront les amateurs.

Il est souhaitable que cet ouvrage interpelle les consciences, nous rappelle aussi que d’autres «Texaco» existent de par le monde et que le combat continue, pour vaincre.

Fabrice BONNEFOY

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