L’auteur argentin Hernán Diaz remporte le prix du jury du festival America de Vincennes

Du 20 au 23 septembre dernier, les amoureux de la littérature américaine anglophone et hispanophone ont pu assister avec joie au festival America, organisé à Vincennes. Après plusieurs jours de conférences, tables rondes et autres activités, les prix du jury et des lecteurs ont été attribués. L’auteur argentin Hernán Diaz, qui vit aux États-Unis, a été récompensé pour son premier roman, Au loin.

Photo : Festival America

Le festival America s’est déroulé il y a deux semaines. Le prix du Roman Page America a été attribué à l’auteur Hernán Diaz, natif argentin et résidant américain, pour son roman Au loin, publié chez Delcourt. Installé à New York depuis 20 ans maintenant, il est le directeur adjoint de l’Institut hispanique de l’université de Columbia. Le finaliste du prix Pulitzer 2018 fait ainsi une entrée fracassante dans les librairies françaises, avec son premier roman récemment traduit de l’anglais. Le public francophone aura le plaisir de découvrir l’histoire de Håkan, un paysan qui erre entre la Californie et New York pour retrouver son frère. Cela fait déjà vingt ans qu’a germé en lui l’idée de ce roman, qu’il a commencé à écrire en 2012. Avec Au loin, il réécrit l’Ouest américain, ce topique littéraire si présent outre-Atlantique.

À l’instar de sa vie, le roman de Diaz est bercé de voyages, de langues et d’errances. Le protagoniste, Håkan est suédois. Rien d’étonnant quand on sait qu’Hernán Diaz a passé son enfance à Stockholm, où il a emménagé à l’âge de 2 ans. Sa famille a en effet dû fuir l’Argentine en 1976, à la suite du coup d’État, car le père de l’auteur était très impliqué dans la vie politique et était donc en danger. Après sept ans sur le territoire suédois, ils sont retournés en Argentine, où l’auteur est resté jusqu’à son entrée à l’université à Londres, avant de déménager définitivement aux États-Unis.

Son oeuvre séduit la critique et les lecteurs, tout comme les combats qu’il mène aux États-Unis, notamment contre les discriminations. Hernán Diaz est en effet intervenu sur la question de la glottophobie, terme savant pour évoquer la discrimination linguistique, c’est-à-dire la question des accents. Fort de son expérience de vie itinérante, l’auteur s’érige en porte-parole de la cause car, quelque soit la langue dans laquelle il s’exprime, on lui reproche toujours un accent américain, espagnol ou suédois.

Il cherche à démontrer qu’il n’y a aucun souci à ne pas parler comme un local car après tout, «un accent est l’écho de la langue ou de l’intonation de celui qui parle une autre langue. […] Il est un rappel du fait qu’une langue n’appartient à personne, pas même aux locuteurs natifs. […] Et le fait qu’il y ait des accents est déjà une preuve que l’on peut se comprendre les uns les autres, malgré nos différences, ce qui est la preuve la plus solide de l’hospitalité au cœur de chacune des langues.»[1] Au loin est donc l’écriture d’un homme qui a fait l’expérience du monde et qui veut partager le sentiment de l’errance avec son lecteur, et Hernán Diaz est l’exemple d’un voyageur qui construit des ponts entre les cultures et les individus.

Nina MORELLI

[1] La citation est traduite de l’anglais par l’auteure.