Personne n’est obligé de me croire, le nouveau roman du Mexicain Juan Pablo Villalobos

On sait depuis son premier roman paru en France en 2011 (Dans le terrier du lapin blanc) que le Mexicain Juan Pablo Villalobos est un des meilleurs humoristes actuels. Personne n’est obligé de me croire, son dernier livre, Prix Herralde en 2016, le confirme une fois encore. Dans son cas, humour est bien synonyme de légèreté, mais n’est pas dénué de réflexion ; ses personnages, fantoches sur certains points, sont des êtres humains capables de nous émouvoir autant que de nous amuser.

Photo : Ámbito cultural/Buchet-Chastel

Le Juan Pablo Villalobos du roman, l’un des protagonistes les plus présents, étudiant mexicain provincial, est entraîné malgré lui dans une sombre affaire par son cousin qui lui-même disparaît très vite de la circulation (si j’ose dire…). Installé à Barcelone pour terminer son master, il est rejoint, via Internet et portables, par une relation douteuse de son cousin et doit se plier à leurs exigences qui le poussent à mener une double, une triple vie. Tout se complique dramatiquement pour lui qui réagit essentiellement par de spectaculaires éruptions cutanées, allergie ou dermatose ? Cette question fondamentale restera posée jusqu’au dénouement.

On croise tout un cortège de personnages plus ou moins attachants, le plus étant souvent un minimum, une Catalane aux dents de travers, des immigrés venus de divers coins du monde pour des raisons multiples, une chienne nommée Viridiana, un Sergio Pitol bienveillant et un peu distant, quelques mafieux invisibles.

Et Juan Pablo Villalobos, le vrai, celui de chair et d’os, entrecroise habilement toute une série de thèmes autour de son intrigue, elle-même digne des meilleurs thrillers : le snobisme de certains universitaires et des sujets de thèses qu’ils dirigent, la supériorité affichée de certains Catalans à propos de leur région, la mixité sociale et internationale de la capitale catalane.

L’intrigue se complique, les pistes se multiplient, les personnages se succèdent pour prendre la parole et donner leur point de vue, avec une mention spéciale à Mme Villalobos mère, redoutable langue de vipère et mère aimante. L’auteur, le vrai, le seul, égratigne dans la joie les diverses administrations politiques, celles du Mexique, de l’Union européenne, de la Catalogne, la nonchalance des étudiants boursiers internationaux qui finissent, à Barcelone en particulier, par former à eux seuls une espèce de classe sociale à part, un certain nationalisme catalan, et aussi, parodie exige, les ficelles plus ou moins apparentes de beaucoup de ces romans dans lesquels on finit par ne plus rien comprendre, l’auteur ayant voulu montrer la complexité du monde du grand banditisme.

Ce que l’on comprend aisément chez Juan Pablo Villalobos, c’est le côté dérisoire de nos vies, qu’elles soient tranquilles et retirées ou pleines d’inattendu comme celle des personnages de Personne n’est obligé de me croire.

Christian ROINAT

Personne n’est obligé de me croire de Juan Pablo Villalobos, traduit de l’espagnol (Mexique) par Claude Bleton, éd. Buchet-Chastel, 288 p, 20 €.

Juan Pablo Villalobos en espagnol : Fiesta en la madriguera / Si viéramos en un lugar normal / Te vendo un perro / No voy a pedirle a nadie que me crea (Premio Herralde), ed. Anagrama.

Juan Pablo Villalobos en français : Dans le terrier du lapin blanc / Si nous vivions dans un endroit normal / Les Temps perdus, éd. Actes Sud.