Hommage à Pedro Lemebel pour l’ouverture du festival Belles Latinas le 10 octobre prochain

Pour l’ouverture du festival Belles Latinas, qui aura lieu le mercredi 10 octobre 2018 à 20 h au Nouveau Théâtre du 8e, nous proposons une soirée de découverte et d’hommage autour de l’auteur et artiste chilien Pedro Lemebel. Cette soirée sera composée de deux temps : d’abord la performance Cœurs fugitifs, issue du projet Pedro, mise en scène par Manon Worms, suivie d’une discussion avec l’équipe du spectacle.

Photo : Andrés Canepa

Artiste visuel, écrivain et chroniqueur à la radio, Pedro Lemebel est né à Santiago du Chili en 1952 et décédé dans la même ville en janvier 2015. Travesti, militant pour les droits des personnes homosexuelles, il est une immense figure populaire au Chili. À travers ses nombreux récits et chroniques, il embrasse un pays entier, le raconte dans tous ses contrastes, traversant la dictature militaire, ses crimes, et ses séquelles sociales, politiques et humaines. Sa voix est la mémoire vivante d’une société-mosaïque, construisant par des récits une galerie de portraits du Santiago résistant. Ses phrases et ses images peuplent les murs des villes et les fêtes du Chili.

Le projet «Pedro», un spectacle de Manon Worms

Des chroniques de Pedro s’échappe une constellation d’émotions fugitives que les acteurs saisissent et incarnent, sur scène et en dehors. Mêlant les corps vivants aux images, la performance à l’archive, l’espace du plateau au relief de la ville, le projet Pedro tente de saisir l’empreinte d’un cœur en la colorant dans mille corps. Après avoir été traduites en français, ces chroniques sont mises en scène pour leur donner un écho sur les planches. En explorant la figure de Pedro Lemebel, le projet Pedro déplie nos propres paysages, ceux qui disent que le désir peut être transgressif, que l’amour est politique, que l’acte de travestissement peut encore être révolutionnaire.

Nous voulons répercuter l’écho de cette voix venue nous toucher si fort aujourd’hui, alors même que nous vivons à des milliers de kilomètres d’elle et dans un tout autre contexte. Nous voulons la faire entendre et découvrir, la faire traverser les corps de celles et ceux d’ici, la propager jusqu’à nous et ce qui nous entoure.

Nous traduisons en français ces chroniques et les mettons en scène pour leur donner un écho dans nos cœurs, dans nos corps et sur nos scènes. Quelque part entre le plus intime et le plus commun. Des chroniques de Pedro, de sa voix et de ses lettres, s’échappe une constellation de cœurs fugitifs que nous saisissons et incarnons, ensemble, sur scène et en dehors, à partir de nous, de nos désirs de rencontres, de luttes, de transformations.

À travers ses chroniques, lettres, récits, manifestes, publiés dans de nombreux recueils, Pedro Lemebel arpente et embrasse un pays entier, le raconte dans tous ses contrastes, ses cruautés et ses fantaisies, traversant dix-sept ans de dictature militaire, ses crimes et ses séquelles sociales, politiques, humaines. D’interventions publiques en émissions de radio, parlant sous un trait de mascara et une couronne de plumes, de perles ou de cicatrices, sa voix est la mémoire vivante d’une société-mosaïque, construisant par des récits de nuits et de rencontres une galerie de portraits du Santiago queer et résistant, pauvre et indigène, solitaire et multiple. Ses phrases et ses images peuplent encore aujourd’hui les murs des villes, les cœurs et les fêtes du Chili.

En France comme dans le reste de l’Europe, Pedro Lemebel est quasiment inconnu, très peu traduit et très peu édité. Le projet Pedro, entamé en 2016, veut combler ce manque. Recherche multiple autour de la figure travestie de Pedro, née sous l’impulsion du choc ressenti à la lecture des textes de Lemebel, l’équipe de Manon Worms cherche à donner à la traduction de cette voix lointaine un écho en différents langages. Des formes performatives, graphiques, visuelles, auditives, créent des trafics entre les genres, les corps vivants et les archives, pour maintenir en liberté cette parole sauvage. Spectacle-maquillage qui procède par accumulation de différentes couches (traductions, créations de sons, d’images et de jeu) pour fabriquer des visages hybrides et éphémères, Pedro compose des espaces sensibles pluriels, tente de saisir l’empreinte d’un cœur en la colorant dans mille peaux, mille langues, mille secrets, d’ici et de là-bas.

L’éclat subversif contenu dans le mélange de corps qui se rencontrent et se transforment sous les yeux complices d’un regard spectateur se réanime à travers ce dialogue ouvert entre notre présent et cet ailleurs lointain.

La performance présentée au NTH8 pour la soirée d’ouverture du festival Belles Latinas, Cœurs fugitifs, est un éclat fugitif du projet Pedro, une émeraude éphémère au cours de cette recherche à plusieurs échelles dont l’étape finale de création est prévue pour le début de l’année 2019.

Manon WORMS

Mise en scène : Manon Worms – Textes : Pedro Lemebel – Collaboration artistique : Marine Garcia-Garnier – Traductions : Leslie Cassagne – Scénographie, vidéo : Jean Doroszczuk – Costumes : Cécilia Galli – Son : Rémi Billardon – Contact : manonworms@gmail.com / +33 6 76 77 62 07