Le pape François en visite officielle en Colombie du 6 au 10 septembre prochain

Le pape François fait « le premier pas » en Colombie. Au moment même où son voisin le Venezuela s’engouffre dans une crise économique et d’agitation sociale particulièrement grave, la Colombie s’apprête à recevoir le pape François. C’est un événement remarquable depuis la dernière visite de Jean-Paul II, en 1986, surtout pour la santé spirituelle des fidèles, ravagée par un demi-siècle d’une guérilla sanglante menée par les rebelles des Farc.

Photo : La Croix – Radio Vaticano

Pour quelques jours, entre le 6 et le 10 septembre, la ferveur religieuse des Colombiens sera exaltée par Demos el primer paso (« faisons le premier pas »), le slogan de la visite du pape et le titre d’une chanson composée pour l’occasion par une fraternité religieuse créée en 2016 à Bogota. Mgr Fabio Suescun Mutis, directeur général de la visite du pape, explique ainsi la devise « faisons le premier pas » : « faire le premier pas est un désir, c’est une décision qui se prend dans la vie. Celui qui fait le premier pas, prendre la décision de laisser une situation qui ne lui convient pas, et d’entreprendre le chemin vers le futur avec foi et espérance. La Colombie a besoin de faire un premier pas pour laisser derrière elle la situation de violence et d’injustice et que tous soient disposés à la réconciliation et à la reconstruction d’un pays nouveau avec Jésus Christ.« 

La présence de François n’a pas comme seul objectif de soutenir la foi du peuple, mais aussi de dresser un message d’espoir aux responsables politiques chargés de prendre des décisions transcendantales pour l’avenir du pays. En effet, après la signature de paix avec la guérilla marxiste des Farc en novembre dernier, le gouvernement essaie enfin d’ébaucher la plateforme sur laquelle asseoir une nouvelle période de prospérité dans la région. Rappelons que le souverain pontife est l’un des principaux précurseurs de l’accord de paix historique entre le gouvernement et la guérilla.

Le programme officiel de la visite papale commencera le 6 septembre, avec la cérémonie de bienvenue à Bogota. La journée du jeudi 7 sera inaugurée par un discours du pape, précédé d’une rencontre avec les autorités sur la Plaza de Armas du palais Nariño, siège du gouvernement où il se réunira avec le président de la République. Pour les jours suivants, voici un aperçu de son programme : Vendredi 8 : le Saint-Père se rendra au pied des Andes pour rejoindre la ville de Villavicencio, où il célébrera une messe avant de présider une rencontre de prière pour la réconciliation nationale. Samedi 9 : Medellín accueillera le pape, ville tristement célèbre pour la violence chronique liée aux cartels de la drogue. François se déplacera au stade de football de La Macarena, visitera le foyer des orphelins San José, et rencontrera les prêtes consacrés, les séminaristes et leurs familles. Dimanche 10 : départ pour Carthagène. Bénédiction des fondations d’un foyer pour les sans-abri de l’œuvre Talitha Qum. Angélus du pape (prière en latin) à l’église Saint-Pierre-Claver. Messe dans la zone portuaire de Contecar avant le départ en fin de journée du pape pour l’aéroport de Rome.

Cette visite répond également au souhait de l’Église de faire rayonner sa foi dans cette région de l’Amérique où les missionnaires catholiques obtinrent des résultats considérables grâce à la conversion massive des peuples autochtones depuis l’époque des conquistadores espagnols, mais aussi celle des esclaves africains. La présence du pape témoigne ainsi de l’intention de l’Église de perpétuer sa présence au XXIe siècle dans une Amérique latine où la foi catholique est mise à rude épreuve par la réalité quotidienne et par l’émergence d’autres concurrents spirituels – protestants, mormons, témoins de Jéhovah, adventistes, etc.

La présence du souverain pontife coïncide avec deux funestes événements : d’une part l’assassinat, en juillet dernier, du prêtre Diomer Chavarria Pérez, 31 ans, dont le corps a été retrouvé dans une contrée fréquentée par les combattants de l’Armée de libération nationale (dernière guérilla encore active en Colombie) ; d’autre part, la situation critique qui depuis six mois plonge le Venezuela dans une tragédie sociale sans précédent. Sur ce dernier point, contrairement à ce que pourrait laisser croire un tel déplacement depuis l’Europe, avant de retourner à ses vitraux romains, le Saint-Père ne s’arrêtera pas dans ce pays où le peuple lutte –  et meurt – dans la rue chaque jour contre la corruption et la répression héritée de l’époque chaviste. Il est difficile de comprendre les enjeux politico-religieux. Curieusement, pour cette traversée papale de l’Atlantique, les Vénézuéliens, qui ont sûrement autant besoin que le peuple colombien du message chrétien qu’il incarne, seront donc privés de la présence physique d’un François nimbé d’une aura de paix et d’espérance.

Eduardo UGOLINI