Selon les Nations unies les disparitions forcées sont en augmentation partout dans le monde

Le 30 août est la Journée mondiale des victimes de disparitions forcées. La Convention contre la disparition forcées des Nations unies,  entrée en vigueur en 2010, a été signée par 96 pays mais ratifiée par seulement 52.

La Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre la disparition forcée la définit par la privation de liberté par des agents de l’État suivie du déni ou de la dissimulation du sort et du lieu où se trouve la victime, la soustrayant ainsi à la protection de la loi (1). En Amérique latine, la disparition forcée a  particulièrement touché le Guatemala, les pays du Plan Condor et le Pérou des années  1960 à 1990.  Aujourd’hui, si en Amérique latine elle touche surtout le Mexique, le Paraguay et le Honduras,  elle est présente et en augmentation sur  toute la planète.

Au Guatemala

Le conflit interne et les dictatures militaires des années 60 à 95 ont provoqué la disparition de 45.000 personnes.  Les victimes étaient en très grande majorité des civils indigènes maya. Plus de 600 villages maya ont été rasés par l’armée guatémaltèque,  et leurs habitants, en majorité des femmes, des enfants et des personnes âgées, massacrés et enterrés dans des fosses communes dont les emplacements restent dissimulés par l’armée. Depuis 10 ans, l’association Groupe de travail contre la disparition forcée au Guatemala lutte pour que le Congrès approuve le projet de loi n° 3590 qui crée la Commission nationale de recherche des victimes de disparition forcée durant le conflit interne. Le Guatemala a signé la Convention internationale le 6 février 2007 mais ne l’a toujours pas ratifiée.

Le Plan Condor

Cette coopération des services secrets des pays du cône sud durant les dictatures des années 70 à 90 a provoqué des milliers de disparus au Chili, au Brésil, au Paraguay, en Uruguay et surtout en Argentine (30.000 disparus !). Les pactes de silence des armées, le manque de volonté des gouvernements démocratiques, des systèmes judiciaires qui trainent les pieds et les lois d’amnistie font que l’on ignore toujours tout du destin de plusieurs dizaines de milliers de personnes. Des manifestations d’hommage aux disparus ont eu lieu dans tous ces pays le 30 août dernier. Pour interpeller gouvernement et parlementaires chiliens, les manifestants ont teint de rouge les fontaines d’eau situées devant le Palais présidentiel de La Moneda. Tous les pays membres de l’ancien Plan Condor ont aujourd’hui ratifié la Convention.

Les disparitions augmentent

Selon l’ONU, les disparitions forcées sont devenues un problème mondial. Si, durant le 20e siècle, elles furent le produit de dictatures militaires, aujourd’hui elles existent dans tous les conflits internes ou non, dans les situations de répression politique ou au titre de « prévention du terrorisme » (Guantanamo). En ce 21e siècle, elles touchent tout particulièrement  les syndicalistes, les petits paysans qui réclament des terres, les défenseurs des droits humains, les organisations de victimes, les témoins de procès et leurs avocats. Le journaliste Carlos Miguélez (2) rappelle que, depuis 1981, le Groupe de travail des Nations unies sur les disparitions forcées a reçu 55.000 plaintes ! Et de dénoncer : « Les menaces et le harcèlement provenant des autorités, l’inefficacité des systèmes judiciaires, la corruption et l’impunité se joignent à l’analphabétisme et le manque d’informations des familles des victimes pour dissuader les gens de dénoncer ce fléau ».

Des signes encourageants

Selon Gabriella Citroni, conseillère juridique de l’organisation de défense des droits humains TRIAL basée à Genève, il y a des progrès (voir leur site). Par exemple dit-elle, le Pérou a fait promulguer une loi sur la recherche des milliers de personnes disparues durant le conflit interne de 1980 à 2000. La Cour suprême du Salvador a déclaré inconstitutionnelle la loi d’amnistie de 1993 qui ouvre la voie à des procès permettant de (peut-être) retrouver les corps des disparus. Au Mexique, une Unité spéciale d’enquête pour les crimes commis contre les migrants. Citroni regrette que « ces avancées ne s’attaquent pas aux causes du mal : la commission même de ces disparitions… Si les États ne se montrent pas à la hauteur de leurs responsabilités, ‘Plus jamais ça’ restera une expression vide de sens et il n’y aura rien à célébrer. »

Jac FORTON

(1) Pour en savoir plus sur la Convention, aller sur  www.ohchr.org/FR/ProfessionalInterest/Pages/ConventionCED.aspx      (2) Dans un article du 2 septembre 2016 publié par Alainet en ligne.