Comment les pays d’Amérique latine ont-ils réagi aux “Panamá Papers”

Au-delà des cas de personnalités comme Mauricio Macri, président de l’Argentine et le joueur de foot Lionel Messi, il y a eu des réactions de la part du Brésil, du Chili, du Pérou, du Venezuela et du Mexique sur des personnalités de ces pays mentionnés dans le listing de « Panama Papers ». Le scandale promet d’avoir des répercussions.

La polémique est installée et on s’attend à un allongement de la liste des possibles fraudeurs fiscaux. Entre autres, l’enquête journalistique baptisée Panamá Papers a révélé que l’actuel président de l’Argentine, Mauricio Macri, était à la tête d’une société jusque là méconnue, avec son père Franco et son frère Mariano, depuis 1998. Mauricio, avec son père, a revendiqué l’entière responsabilité du scandale. L’entreprise offshore du chef de l’État a amené l’opposition au gouvernement à exiger des explications et des détails sur sa participation à la Fleg Trading Ltd, enregistrée aux Bahamas, en affaires avec le Brésil, citée dans les documents. “Le président Mauricio Macri devrait s’exprimer sur la chaîne nationale pour expliquer sa situation  aux argentins”, a déclaré Graciela Camaño, députée du Frente Renovador. Ce même Mauricio Macri a démenti cette situation et affirmé “que tout était correct” et “qu’il n’y avait rien d’étrange dans cette opération”, lors d’une interview sur le canal C de la province de Córdoba.

Les “Panamá Papers” désignent la fuite de plus de 11,5 millions de documents confidentiels issus du cabinet d’avocats panaméens Mossack Fonseca, détaillant des informations sur plus de 214 000 sociétés offshore et sur les noms des actionnaires de ces sociétés, parmi lesquels des hommes politiques, des milliardaires, des sportifs de haut niveau ou des célébrités de tous les pays du monde. Ces documents (des années 1970 à fin 2015)  initialement envoyés à un quotidien allemand en 2015 ont été adressés à plus de 80 médias mondiaux par l’intermédiaire du Consortium international pour le journalisme d’investigation (ICIJ). Une autre personnalité argentine qui apparaît dans les documents est le crack du FC Barcelone, Lionel Messi, qui aurait acheté une entreprise à Mossack Fonseca pour tenter de cacher certains de  ses revenus. La famille du sportif a reconnu l’existence de cette société, en niant toute irrégularité, et en précisant que ses avocats envisageaient une action légale contre les médias qui ont divulgué l’information.

Venezuela

Selon le député Ismael García, l’Assemblée nationale du Venezuela, sous le contrôle de l’opposition, va ouvrir une enquête sur les dénonciations de paradis fiscaux, dans lesquelles apparaissent plusieurs ex-fonctionnaires.

Brésil

Dans le pays voisin, le président de la Chambre des députés, Eduardo Cunha, a nié une information du portail internet “UOL” selon laquelle il posséderait des comptes dans les paradis fiscaux, l’un étant administré par Mossack Fonseca. Le politicien brésilien, soupçonné de blanchiment d’argent dans l’enquête sur la corruption dans la société d’état pétrolière Petrobras, a affirmé sur son compte Twitter qu’il n’avait aucune relation avec l’entreprise. “Pour être clair, je n’ai aucun lien, direct ou indirect, avec une offshore” a-t-il soutenu sur le réseau social.

Mexique

Au Mexique, les personnes nommées dans les documents ont gardé le silence, entre autres l’homme d’affaires Juan Armando Hinojosa Cantú, lié au président Enrique Peña Nieto, président qui a été l’objet de critiques pour avoir acquis il y a quelques années, avec la première dame, une propriété appartenant à l’homme d’affaires. Une enquête avait été ouverte pour un possible conflit d’intérêts. Selon le site “Aristegui Noticias”, qui a eu accès aux documents, alors qu’Hinojosa était au cœur de la polémique concernant sa demeure, il aurait dissimulé 100 millions de dollars dans des paradis fiscaux. L’homme d’affaires n’a fait aucun commentaire concernant ces fuites. Le directeur du Service de l’Administration fiscale du Mexique s’est dit, à radio Fórmula, peu étonné par les révélations, sachant que de nombreux mexicains investissent dans des pays à basse fiscalité. L’investissement dans ces pays n’est pas forcément irrégulier. Il peut être utilisé pour protéger des actifs et pour des raisons de confidentialité. Mais il est vrai que certains le font pour échapper au fisc, ce qui est alors illégal et va être vérifié de près.

Chili

Gonzalo Delaveau, président par intérim de l’organisation non gouvernementale Chili Transparent, a annoncé qu’il renonçait à sa fonction. Il a été cité comme lien entre des hommes d’affaires et les bureaux Mossack Fonseca. Il a déclaré à CNN Chili qu’il démissionnait parce qu’il “s’interrogeait sur l’institution à laquelle il a consacré plus de quatre ans”, et parce que son mandat expire la semaine prochaine. Le Service des Impôts a déclaré dans un communiqué qu’il allait “suivre de près” les chiliens mentionnés dans les papiers des Panamá.

Pérou

Au Pérou, le premier ministre Pedro Cateriano a écrit sur son compte Twitter :“Le sujet des Panamá Papers – qui implique des Péruviens – doit être rapidement étudié.” Selon le portail internet Ojo-Publico.com, les documents mentionnent Jorge Javier Yoshiyama Sasaki, un des principaux financiers de la candidate présidentielle Keiko Fujimori. Dans une déclaration faite au Journal Gestión, Yoshiyama a nié connaître des fonctionnaires de Mossack Fonseca, au Pérou ou à Panamá et a dit “n’avoir jamais eu de contact personnel par courrier ou par téléphone avec ce cabinet”. Keiko Fujimori, interrogée par des journalistes sur la situation de Yoshiyama, a répondu : “je remercie monsieur Jorge Yoshiyama pour les aides qu’il a apportées à notre parti, et n’ai rien d’autre à déclarer”.

Mossack Fonseca

Ramón Fonseca, co-fondateur de Mossack Fonseca, a déclaré ce 4 avril que son entreprise crée des sociétés qui sont vendues à des investisseurs et qu’elle n’intervient pas dans la façon dont sont utilisées ces sociétés. “Nos clients peuvent être une institution, un avocat, une banque… Nous n’avons aucun contact avec le client final” a-t-il assuré. “Nous sommes comme une usine de couteaux, et si le couteau est utilisé pour commettre un assassinat, nous ne sommes pas responsables” a-t-il ajouté, en précisant qu’ils créaient à l’année 20 000 sociétés “offshore”.

Catherine TRAULLÉ

Source : BigBang – 04/04/16
Photo (CC) : Mauricio Macri – Gobierno de la ciudad de Buenos Aires