Réouverture du procès de l’ex dictateur Ríos Montt

Le général Efraín Ríos Montt est accusé de génocide pour la mort de centaines de Maya Ixils durant sa dictature. Sa condamnation à 80 ans de prison lors d’un premier procès avait été annulée par la Cour de Constitutionalité. Un nouveau procès vient d’être réactivé.

Rappel : après les témoignages de 98 membres de l’ethnie maya-ixil survivants des massacres menés par l’armée guatémaltèque en 1982, le général-dictateur Efraín Ríos Montt avait été condamné le 10 mai 2013 à 50 ans de prison pour génocide et 30 ans pour crimes contre l’humanité suite à l’assassinat de 1771 Ixils. Le dictateur militaire les considérait comme alliés de la guérilla ; bien que désarmés, hommes, femmes, enfants et vieillards furent massacrés. Le général José Rodríguez, son chef du renseignement, ne possédant aucun mandat de commandement, avait été acquitté.

Dix jours plus tard, la Cour de Constitutionalité annulait pour vices de forme  cette condamnation historique dans un pays réputé pour l’impunité de ses dictateurs : un recours de la défense n’aurait pas été pris en considération par les trois membres du tribunal. Il s’agissait clairement d’une argutie destinée à perpétuer l’impunité. La Cour avait ordonné de rouvrir le procès le 5 janvier 2015 en reprenant la procédure telle qu’elle était en novembre 2011, c’est-à-dire avant que ne s’ouvre le précédent procès.

 D’abord, régler deux recours de la défense

Avant que le procès ne s’ouvre vraiment, le Tribunal B du Risque Majeur doit attendre la décision de la Cour pénale qui doit répondre au recours déposé par la défense du général selon lequel « Il doit bénéficier de l’amnistie votée par le décret 8-86″ de l’année 1986. Mais pour le magistrat guatémaltèque Thomas Buergenthal, ancien juge à la Cour Internationale de Justice à La Haye, « en droit international, les amnisties pour génocide et crimes contre l’humanité ne sont pas valides »… Deuxième recours : la défense du général veut que la présidente du tribunal, Janeth Valdez, soit écartée pour partialité : lorsqu’elle était étudiante, elle avait écrit un Mémoire intitulé « Critères pour une meilleure application du crime de génocide ».

Le général est-il vraiment malade ?

Son avocat défenseur, Francisco Palomo, affirme que le général souffre d’une grave hernie et qu’il ne supporterait pas la position assise obligatoire devant une Cour de justice. Il faudrait donc reporter le procès. Première réponse de la Procureure générale à charge de l’accusation, « même si le général ne peut assister en personne pour cause de difficulté physique, il peut être représenté par ses avocats ». Lorsque l’on sait que la commission qui a estimé que le dictateur ne pouvait pas se déplacer est dirigée par le médecin Mario Bolaños, ancien député du FRG, le parti autrefois dirigé par… Ríos Montt, on a le droit de douter de la réalité de la maladie…

 Les acteurs du procès : Le tribunal est présidé par la juge Janeth Valdez, assistée des magistrats Sara Yoc Yoc et María Castellanos. La Procureure du Ministère public est Heydi Pineda. Outre les dizaines de survivants ixils qui ont accepté de revenir témoigner à la barre, deux associations de défense des droits humains se sont déclarées parties civiles : l’Association Justice et Réconciliation, et Centre d’action légale pour les droits humains.

Le principal accusé est à nouveau le général Ríos Montt, devenu président en 1982 suite à un coup d’État contre un autre général dictateur, et démis de ses fonctions par un coup d’État de son ministre de la défense, encore un général. Le second accusé est le général José Rodríguez, chef du renseignement militaire à l’époque.

Espaces latinos suivra ce procès attentivement car l’enjeu est très important : l’impunité des crimes d’une dictature ou enfin la justice pour les dizaines de milliers de victimes civiles, en grande majorité d’origine maya, d’une guerre civile qui a duré près de 40 ans…

Jac FORTON