Mario Sandoval, accusé d’avoir été un tortionnaire, veut éviter l’extradition

La Chambre de l’instruction de Paris autorise l’extradition vers l’Argentine de Mario Sandoval. Accusé de crimes contre l’humanité, privation illégale de liberté et actes de torture ayant entrainé la mort de Hernan Abriata pendant la dictature argentine (1976-1983), la justice argentine avait requis son extradition.

Suivi de notre article du 9 avril dernier

En 1976, Mario Sandoval était inspecteur à la Commission des affaires politiques de la Coordination Fédérale, une section de la Police fédérale argentine durant la dictature. Il “travaillait” à l’ESMA (École de mécanique de la Marine de guerre) (1). En octobre de cette année, il arrêtait l’étudiant en architecture Hernan Abriata qui disparaissait.

Après la chute de la junte militaire en 1983, Sandoval s’installe à Paris, obtient un doctorat en sciences politiques, un DEA en philosophie politique à Paris-I et se spécialise dans “l’intelligence économique”.

En 1994, il obtient la nationalité française. Selon Mediapart, “il a ainsi pu décrocher des postes d’enseignant en relations internationales et en intelligence économique à l’Institut des hautes études pour l’Amérique latine, à l’École supérieure d’économie et de gestion de Paris, à l’université de Marne-la-Vallée et au Centre français de recherche sur le renseignement” (CF2R) (2).

 Un droit français “contestable”

La Chambre de l’instruction de Paris a finalement autorisé son extradition vers l’Argentine. La Chambre répondait ainsi à une demande d’extradition émise le 15 mars 2012 par le juge Sergio Torres en Argentine pour la mort de Hernan Abriata, étudiant en médecine, enlevé le 30 octobre 1976 et emprisonné à l’ESMA d’où il disparaît. La justice argentine souhaite l’impliquer aussi dans 601 autres cas de disparition.

Dans un communiqué de presse, un collectif d’associations de défense des droits humains françaises et argentines  (3) “regrette que la Chambre n’ait pas retenu les cas de nombreuses autres victimes disparues ainsi que ceux de victimes survivantes pour cause de prescription”. Le Collectif regrette également que “la Chambre se soit conformée à une jurisprudence du droit français  hélas constante mais contestable du point de vue du droit international, qui n’accorde le statut de crime contre l’humanité qu’aux seuls crimes commis durant la Seconde guerre mondiale, avant l’entrée en vigueur du nouveau code pénal en 1994”. Cela signifie qu’à cause du droit français, Sandoval ne pourra être jugé en Argentine que pour le cas Abriata et non pour les 601autres disparus. De plus, Jean Bartholin, président de la Chambre d’accusation de Paris, précise que Sandoval ne pourra pas être condamné à plus de 15 ans de prison, peine correspondant à ce type de crime en Argentine en 1976.

Le gouvernement français doit maintenant signer un décret d’extradition qui pourra être contesté par les avocats de Sandoval devant le Conseil d’État. Tout cela peut prendre plusieurs mois… Sandoval bénéficiant du statut de “liberté sous contrôle judiciaire”, Sophie Thonon, avocate représentant l’Argentine, “demande aux autorités françaises qu’elles fassent tout ce qui est possible pour empêcher que Mario Sandoval ne s’échappe”.

 Jac Forton

(1) ESMA : près de 5000 personnes ont disparu après leur passage dans ce centre de tortures…

(2) « Mario Sandoval doit être extradé vers l’Argentine« , publié le 8 octobre 2013.

(3) En France : L’Association FAL (France Amérique Latine), la FIDH (Fédération internationale des Ligues des droits de l’homme), l’ACAT (Action des chrétiens pour l’abolition de la torture) et le Collectif argentin pour la mémoire. En Argentine : le CELS (Centro de Estudios Legales y Sociales et, le CAJ (Comité de acción Jurídica).