« Gloria » un film du Chilien Sebastián Lelio

À 58 ans, Gloria se sent toujours en forme. Divorcée depuis plus de dix ans, elle fait de sa solitude une fête et passe ses nuits dans les dancings de Santiago. Quand elle rencontre Rodolfo, tout change. Elle tombe amoureuse et s’abandonne totalement à leur passion tumultueuse, mais Rodolfo n’arrive pas à se sortir de son passé…

Nous ne quitterons pas un seul instant Gloria. Nous en saurons un peu plus sur son ancien mari et ses enfants à l’occasion de repas ou rencontres. Par contre, nous ne saurons de la vie de Rodolfo que ce qu’il en dit ou ce que l’on entend sur son portable. Nous restons centrés sur le couple et la vie extérieure n’intervient que par des images à la télévision, des discussions entre amis, ou des manifestations d’étudiants qu’elle rencontre. Gloria a beau être forte, comme Gena Rowlands dans le film Gloria de Cassavetes, elle est secouée par sa passion.

Voilà comment Sebastián Lelio a situé le contexte du film : « Les chiliens pensent surtout à l’avenir, ils sont en cela un peuple résolument moderne. Ils ont enfin obtenu leur liberté, désormais ils font tout pour la conserver. Mais pas seulement, ils font aussi pleinement partie des sociétés actuelles. Ils sont eux aussi à la conquête de leur propre bonheur, de leur propre plaisir. Ils se découvrent en tant qu’individus, pas seulement en tant que collectivité et cela, c’est nouveau pour nous. C’est ça le Chili aujourd’hui. Et il y a encore beaucoup d’attentes(…). Il y a en ce moment dans mon pays une énergie portée par la jeune génération, qui pousse au changement pour une plus grande encore modernisation. Je le montre dans Gloria en filmant des manifestations étudiantes. Le Chili est effectivement à la croisée des chemins : les habitudes de vie anciennes ne sont pas encore mortes, et les nouvelles n’ont pas encore vraiment émergé, ne sont pas encore nées. Cette période de mutation était très stimulante, très inspirante pour un film. » Les situations sont filmées au plus prés des personnages et les chansons sont omniprésentes. C’est un film où l’on boit beaucoup, mais où il est difficile d’être heureux.

Paulina García qui interprète le rôle de Gloria est très connue au théâtre, mais a tourné très peu au cinéma. Son interprétation lui a permis d’obtenir l’Ours de la meilleure actrice au Festival de Berlin 2013. Quant à Sebastián Lelio, il avait attiré l’attention dés son premier film en 2006 La Sagrada familia. Suivront Navidad sorti en 2009 et El Año del Tigre en 2011, toujours inédit en France. C’est donc un cinéaste à suivre.

Au festival de Berlin, la Berlinade, qui vient de se terminer,  deux films latinos se sont fait remarquer cette année, tous deux réalisés par des femmes. Il s’agit de La Tercera Orilla, de l’Argentine Celina Murga et de De Arriba, de la péruvienne Claudia Llosa. Les deux films partent d’une thématique similaire, les relations  entre parents et enfants, mais sont traités différemment. Claudia Llosa a tourné son film au Canada et en anglais. Mais le jury ne les a pas retenus et  a attribué l’Ours d’or à un film chinois, Black Coal, Thin Ice (« Charbon noir, glace fragile ») de Diao Yinan, un film policier filmé dans un paysage urbain hivernal. L’interprète principal du film, Liao Fan, a reçu l’Ours d’argent du meilleur acteur. Le prix spécial du jury est allé à The Grand Budapest Hotel, de Wes Anderson (États-Unis). Alain Renais, 91 ans, a également reçu un prix pour Aimer, boire et danser.

Alain LIATARD

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