Trois mois de documentaires chiliens à la cinémathèque de la BPI au Centre Pompidou à Paris

Sous le titre Chili, cinéma obstiné, la Bibliothèque publique d’information (BPI) du Centre Pompidou à Paris propose une rétrospective d’une cinquantaine de films réalisés entre 1958 et 2020 par trois figures du documentaire chilien : Patricio Guzmán, Carmen Castillo et Ignacio Agüero. Du 11 septembre au 18 décembre.

Photo : BPI du Centre Pompidou (Paris)

Le 25 octobre 2020, le peuple chilien doit se prononcer sur le maintien de la constitution héritée il y a trente ans de la dictature de Pinochet. Un moment décisif pour l’histoire du pays, paralysé depuis octobre dernier par  une crise sociale , puis sanitaire. Ce jour-là, une séance spéciale sera consacrée au travail des artistes et des cinéastes réalisé depuis le début de la contestation sociale.  Au cours de ces trois mois, seront proposés des films inédits, des redécouvertes, des rencontres mais surtout un hommage exceptionnel à l’écrivain et cinéaste Luis Sepúlveda, emporté par la Covid-19 en avril dernier.

Les trois documentaristes chiliens

Ignacio Agüero est un réalisateur de films documentaires chilien qui a co-réalisé les spots télévisés No to Pinochet lors du référendum au Chili en 1988. Il est également connu pour son travail d’acteur dans des films d’art et des mini-séries télévisées dirigés par Raúl Ruiz et José Luis Torres Leiva. Auteur, réalisateur, producteur, acteur, il est né à Santiago du Chili en 1952. Cinéaste ayant contribué́ à la dénonciation des exactions sous la dictature de Pinochet (No olvidar, 1982, projeté dans Chili : 1973-2013), professeur de cinéma documentaire à l’école de cinéma de l’Universidad de Chile, il est l’un des membres fondateurs d’ADOC, l’association des documentaristes chiliens. Dans Aquí se construye (2000), il aborde un phénomène propre à la « modernité » : la démolition de quartiers entiers pour faire place à une ville écrasante et inhumaine composée d’immenses immeubles modernes. En 2011, il réalise GAM, un documentaire sur le bâtiment abritant actuellement le Centre culturel Gabriela Mistral et, l’année suivante, il réalise un documentaire plus personnel El Otro Día.  Parmi ses derniers films, Como me da la gana II (2016) et Nunca subí el Provincia (2019) ont tous les deux obtenu le Grand Prix de la Compétition internationale au FID Marseille. 

Carmen Castillo est une écrivaine et cinéaste française d’origine chilienne, née le 21 mai 1945 à Santiago du Chili où son père est architecte d’espaces collectifs. Elle fut d’abord professeure d’Histoire à l’Université, puis travailla pour le président chilien Salvador Allende, plus précisément avec Beatriz, la fille et secrétaire de celui-ci, au Palais de La Moneda. Un an après le Coup d’État fomenté par Augusto Pinochet le 11 septembre 1973 avec l’aide de la CIA (USA), son compagnon Miguel Enríquez, le leader du mouvement révolutionnaire MIR, fut abattu par les militaires le 5 octobre 1974, dans la maison où ils s’étaient cachés, au 725 de la rue Santa Fé, à Santiago du Chili. Carmen Castillo, alors enceinte, fut gravement blessée lors de l’attaque et évacuée à l’hôpital grâce à des voisins courageux qui appelèrent une ambulance et insistèrent pour qu’elle soit hospitalisée d’urgence. Elle perdit son bébé à la suite de cette attaque des forces militaro-policières. Elle fut expulsée du Chili vers l’Angleterre, grâce à la pression internationale qui la tirera des griffes de la répression en novembre 1974. Après un séjour décevant à Cuba, elle revient à Paris en 1977 où elle refait sa vie et devient réalisatrice. Ses films, comme ses livres, évoquent ses combats pour la liberté, son pays, les blessures du continent latino-américain… Elle continue à militer pour la démocratie au Chili. En 1996, avec Tessa Brisac, elle lance un appel à soutenir le mouvement zapatiste qui reçoit de nombreuses signatures d’intellectuels et d’artistes. En 2007, elle réalise Rue Santa Fe, documentaire qui retrace le parcours de sa génération, l’aventure de sa famille et son itinéraire personnel. 

Patricio Guzmán est né en 1941 à Santiago du Chili. Il fait ses études à l’Ecole Officielle de l’Art Cinématographique à Madrid et dédie sa carrière au cinéma documentaire. Ses œuvres sont régulièrement sélectionnées et récompensées dans les festivals internationaux. Dans les années soixante-dix il s’intéresse au gouvernement de Salvador Allende en produisant et réalisant La Bataille du Chili, une trilogie documentaire pour laquelle il collabore avec Chris Marker. Cette œuvre, qui lui vaut plusieurs prix importants, fonde les bases de son cinéma. Expatrié à Paris, avec son épouse Renate Sachse, il reste très attaché à son pays et à son histoire. Il réalise ainsi de nombreux documentaires sur le Chili, notamment autour des deux grandes personnalités politiques de son pays : Augusto Pinochet (Le Cas Pinochet en 2001) et Salvador Allende (Salvador Allende en 2004). Il montre aussi la lutte de l’Église catholique pour la défense des droits de l’homme dans Au nom de Dieu en 1987. En 2019, le cinéaste présente à Cannes La Cordillère des Songes, un documentaire poignant qu’il a tourné sur la cordillère des Andes. Après, Nostalgie de la lumière et Le Bouton de Nacre, son dernier documentaire est une œuvre poétique qui vous immerge au cœur de la cordillère des songes. Terre sauvage, difficilement accessible, cette montagne qui surplombe la ville de Santiago est le témoin silencieux de l’histoire compliquée du Chili.

D’après l’Agence Valeur Absolue

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