« Une mère incroyable » un film du Colombien Franco Lolli

Présenté en ouverture de la Semaine de la critique à Cannes. À Bogotá, Silvia, mère célibataire et avocate, est mise en cause dans un scandale de corruption. À ses difficultés professionnelles, s’ajoute une angoisse plus profonde. Leticia, sa mère, est gravement malade. Tandis qu’elle doit se confronter à son inéluctable disparition, Silvia se lance dans une histoire d’amour, la première depuis longtemps.

Photo: festivaldebiarritz

Le réalisateur dresse le portrait d’une femme qui doit faire face à des situations complexes et urgentes, aussi bien dans sa vie professionnelle, que familiale et personnelle. Franco Lolli, dans ce second film, creuse un sillon dont l’exigence formelle transcende le cadre réaliste du récit pour atteindre le plus profond des êtres, au cœur des émotions les plus vives et les plus pures, que seul le cinéma sait transmettre.

« Mes films sont presque uniquement, dit-il, le produit de mon inconscient ! Litigante a une structure assez classique et raconte une histoire simple en apparence, mais souterrainement, il y a beaucoup de choses qui finissent par être filmées presque sans que je le veuille, en tout cas sans que je le décide. C’est sans doute ce qui donne du poids au film. Quand je vais au cinéma, ce qui m’intéresse c’est de sentir que le film possède plusieurs couches. J’ai d’ailleurs l’impression que c’est quelque chose qui s’est un peu perdu, que les films sont de plus en plus superficiels. C’est la grande différence entre Scorsese et les réalisateurs qui font des films “à la Scorsese”. Sur le tournage de Litigante, j’ai pleuré à peu près vingt jours sur quarante, j’étais remué par ce que je filmais. Pendant que je mettais en scène la mort d’une mère, ma mère était en rémission et ma femme était enceinte de 8 mois. Cela a forcément chargé le film. Litigante parle de la fin de vie, un sujet assez difficile, et pourtant le film dégage une énergie et une vitalité extraordinaires! Plus on s’approche de la mort, plus la vie est nécessaire, importante. Je viens d’un pays dangereux : la Colombie, où la mort n’est jamais loin, parce qu’il y a de la violence, parce que les hôpitaux marchent mal…

Le rapport à la vie est différent. On fait la fête autrement, on vit autrement qu’en Europe. Il y a un état d’esprit du style “si je meurs demain, au moins j’aurais vécu, dansé, pris du bon temps…”. Quand ma mère a été informée de son cancer, je me suis dit inconsciemment : il faut vivre! Je me suis mis à écrire ce film très vite, j’ai lancé plein d’autres projets avec ma société de production, j’ai ressenti l’envie d’avoir un enfant aussi. J’ai déployé une énergie colossale dans le travail et dans ma vie personnelle en me disant que si ma mère venait à mourir, j’aurais bâti des choses pour ne pas m’effondrer. Le film raconte ça : quand Silvia comprend que sa mère peut mourir, elle change énormément de choses dans sa vie qu’elle n’aurait pas changées sinon. Elle rencontre un homme, quitte son travail, se rapproche de son fils… » 

Né en 1983 à Bogotá, Colombie, Franco Lolli a fait ses études de cinéma en France, au sein du département Réalisation de l’école de cinéma La Fémis, d’où il sort diplômé en 2007 avec les félicitations du jury.

Alain LIATARD

Sortie le 19 février.