Visa pour l’image 2019 : Guillermo Arias récompensé du Visa d’or pour son travail sur les caravanes de migrants

Le photographe mexicain Guillermo Arias (AFP) a remporté samedi 7 septembre le Visa d’or pour son travail sur les caravanes de migrants d’Amérique centrale qui se dirigent vers les États-Unis. C’est la troisième fois en cinq ans qu’un photographe de l’AFP décroche ce prix. Le festival Visa pour l’Image, qui a lieu à Perpignan du 7 au 15 septembre, est considéré comme le plus grand rassemblement photojournalistique au monde. Le reportage de Guillermo Arias, réalisé entre 2018 et 2019, sera exposé jusqu’au 15 septembre à Perpignan. 

Photo : Paris Mach

Interviewé par Laure Etienne pour Paris Match News, le photographe indépendant a déclaré  : « J’ai été très surpris. Les travaux de mes collègues finalistes [Ivor Prickett, Goran Tomasevic  et  Lorenzo Tugnoli] sont incroyables et puissants. En comparaison, le mien est plus discret.(…) Être invité par le festival et voir mon travail exposé, c’était déjà un rêve devenu réalité. Je suis vraiment heureux. » Il a ajouté : « Je suis très ému, très honoré, d’être récompensé par le plus prestigieux festival de photojournalisme au monde » à l’AFP après la remise du prix. 

Les spécialistes ont particulièrement salué son travail à la fois engagé et poétique. Pour Marielle Eudes, Directrice de la Photo à l’AFP, cette récompense « salue le travail au long cours de Guillermo, un photographe à la fois humble et extrêmement talentueux, qui porte un regard singulier, sensible, et toujours à la bonne distance sur les thématiques migratoires liées à la frontière. Il réalise depuis plusieurs années un travail extrêmement précieux pour documenter ce qui se passe sur cette frontière, qu’il a parcourue de très nombreuses fois. » 

Guillermo Arias est un photographe indépendant local qui travaille principalement sur les questions de migration. Dans son interview à Paris Match News, il a déclaré que « ce sujet constitue la part la plus importante de [s]on travail. [Il] habite à Tijuana au Mexique, les problématiques frontalières font partie de [s]on quotidien. [Il] avai[t] commencé à [s’]intéresser à cette question avant même de [s’]établir dans la ville. Entre autres lorsqu’[il] travaillai[t] pour Associated Press. ». 

Pour traiter de thématiques complexes comme les migrations, l’artiste a une méthode bien à lui  : « C’est le point de vue d’une personne qui vit sur place, qui connaît l’histoire et qui ne veut pas tomber dans les stéréotypes« , a-t-il déclaré en fin de semaine. « Mes images ne sont pas aussi dramatiques que si elles avaient peut-être été prises par un photographe occidental. Je n’aime pas l’idée de victimiser mes sujets, il y a assez de drame comme ça autour d’eux« , avait-il ajouté. 

Cette distance et cette pudeur relèvent d’un profond respect pour les migrants qu’il a accompagnés. Artiste engagé, il a suivi la première caravane de migrants d’Amérique centrale avec beaucoup d’intérêt. « J’ai voyagé avec la “caravane” pendant douze jours d’affilée, dans le sud du Mexique. La journée, je voyais ce qu’ils vivaient, mais le soir je les quittais. J’avais la chance de pouvoir avoir un vrai repas et de dormir dans une chambre. Ensuite, je les ai attendus dans le nord du pays. En tout, j’ai passé quatre mois à couvrir le sujet. » a-t-il déclaré dans son interview à Paris Match News. C’est ainsi qu’il considère son rôle de photographe. 

Le phénomène migratoire étudié dans son documentaire a démarré en 2018 et s’est renouvelé depuis. La première caravane de migrants d’Amérique centrale s’est formée et dirigée vers les États-Unis en 2018, il y a un an environ. C’était une nouvelle forme de migration  : la migration en masse. Les migrants recherchaient un travail, une vie meilleure, ils fuyaient la violence et la peur instaurées par les gangs et les narco-trafiquants au Mexique. 

Ce phénomène s’est renouvelé par la suite, ce qui a suscité la colère de Donald Trump et une augmentation des tensions entre les États-Unis et le Mexique. Selon le photographe Guillermo Arias, ce phénomène est mondial et doit être mis en lumière par les photographes. « Le plus important, c’est qu’on puisse donner de la visibilité à ce problème des migrants, qui est universel. Et si à travers les migrants centraméricains, on peut mettre la lumière sur tous les migrants du monde, c’est notre rôle« , a-t-il déclaré à l’AFP après avoir reçu sa récompense. 

Guillermo Arias succède à la française Véronique de Viguerie, la première femme à décrocher la récompense du  Visa d’or Paris Match News en 20 ans. C’était seulement la cinquième depuis la première édition du festival en 1989. 

Le festival récompense souvent des photographes engagés pour des causes dramatiques, mondiales et locales. Ainsi, le Belge Laurent Van der Stockt fut lauréat en 2017 pour sa couverture de la bataille de Mossoul en Irak. 

Lors de cette 31ème édition, les autres nominés pour le Visa d’or étaient le photographe irlandais Ivor Prickett (The New York Times) pour « La fin du califat » du groupe État islamique en Irak/Syrie, le Serbe Goran Tomasevic (Reuters) pour « Une autre guerre civile en Libye » et l’Italien Lorenzo Tugnoli (The Washington Post / Contrasto-Rea) pour la crise au Yémen. 

Francesco Anselmi (Contrasto) a reçu le Visa d’or de la presse quotidienne, Abdulmonam Eassa (AFP) le Visa d’or humanitaire du CICR, Frédéric Noy le prix de la Région d’Occitanie, William Albert Allard le Visa d’or d’honneur du Figaro Magazine et « made in france » (un documentaire réalisé pour le site d’investigation Disclose) pour le Visa d’or de l’information numérique France Info, entre autres. 

Guillermo Arias, le grand gagnant de ce festival, est un photographe à surveiller. Nous le retrouverons très certainement sur la place publique. « Je compte continuer à travailler sur la migration. Étant établi à Tijuana, j’habite pour ainsi dire dans mon sujet. » a-t-il déclaré dans son interview à Paris Match News. 

Inès JACQUES

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