Des milliers de migrants honduriens marchent vers les États-Unis, envers et contre Trump

Défiant les menaces de Donald Trump, une foule de milliers de migrants, pour la plupart honduriens, poursuit sa marche vers les États-Unis. Après avoir traversé le Guatemala, les migrants ont franchi la frontière mexicaine et ont installé des camps de fortune dans des espaces publics de la ville de Tapachula. La police mexicaine, qui suit leur progression, se garde pour l’instant d’intervenir. Nous reproduisons ici un article de Radio Canada.

Photo : Infobae

Ces migrants qui, par méfiance, ont refusé de se rendre dans les refuges que leur ont réservés les autorités, bénéficient de l’aide de Mexicains pour poursuivre leur chemin, que ce soit à bord de camionnettes, de fourgonnettes ou de camions de marchandises. L’un de ces bons Samaritains, Jesus Valdivia, de Tuxtla Chico, au Mexique, a laissé monter jusqu’à une vingtaine de migrants dans son véhicule, au détriment de sa suspension qu’il entendait parfois grincer sous leur poids. «Vous devez aider ces gens, a-t-il commenté. Aujourd’hui, on le fait pour eux, demain ce sera pour nous.» M. Valdivia ajoute qu’il reçoit un cadeau précieux des gens qu’il aide : «Ils nous apprennent à apprécier ce qu’ils n’ont pas

L’une de ses passagères, Brenda Sanchez, de San Pedro Sula, au Honduras, a voyagé avec ses trois neveux de 10, 11 et 19 ans. Elle a tenu à témoigner sa gratitude envers «Dieu et les Mexicains qui les ont aidés». Elle a même eu de bons mots pour la police mexicaine. «La caravane comprend 7233 personnes, dont la plupart ont l’intention de continuer leur marche vers le nord», a déclaré le porte-parole adjoint de l’ONU, Farhan Aziz Haq, en soulignant la nécessité qu’elles soient «traitées avec respect et dignité».

Farhan Aziz Haq a précisé que l’Organisation internationale des migrations (OIM) et le Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR) de l’ONU étaient mobilisés pour porter assistance à ces migrants. «Cette situation doit être gérée en accord avec le droit international et dans le plein respect des pays à contrôler leurs frontières», a ajouté Farhan Aziz Haq en faisant valoir que «les États de la région devaient coopérer pour résoudre la crise».

Le rêve américain

Épuisés par de longues heures de marche, les migrants ne songeaient qu’à se procurer de quoi survivre. «Je veux juste trouver de la nourriture et un endroit où dormir», a déclaré un jeune Hondurien de 16 ans, Roger Pineda, qui a rejoint la caravane la semaine dernière avec cinq membres de sa famille et un groupe d’amis. Ils disent avoir fui la violence, la corruption et la pauvreté de la ville de San Pedro Sula. «J’espère que Trump nous permettra de passer de l’autre côté», a-t-il lancé.

Transportant l’ours polaire en peluche de ses filles de trois et quatre ans, une Hondurienne explique qu’il s’agit du seul et unique jouet qu’elle a apporté. Diplômée en administration des affaires, Besi Jaqueline Lopez souhaite trouver du travail aux États-Unis. Elle précise avoir été incapable de le faire au Honduras. Elle accepterait également de demeurer au Mexique si elle parvenait à y décrocher un emploi.

Les migrants ont pu compter sur la sympathie de nombreux Mexicains qui leur ont fourni eau, nourriture et vêtements. Alors que les migrants traversaient des villages mexicains, les habitants ont applaudi et crié des encouragements. Une Mexicaine de Lorenzo, Maria Teresa Orellana, a distribué des sandales aux migrants passant par là. «C’est de la solidarité», dit-elle. «Ce sont nos frères.»

Menace de châtiments

Après avoir blâmé les démocrates pour la «faiblesse des lois» sur l’immigration quelques jours auparavant, Donald Trump a déclaré sur Twitter lundi que : «Les caravanes sont une honte pour le Parti démocrate. Changez les lois sur l’immigration MAINTENANT !» «Tous les efforts sont faits pour mettre un terme aux afflux d’étrangers illégaux de franchir notre frontière méridionale», a-t-il déclaré dans un autre tweet. «Les gens doivent faire une demande d’asile au Mexique en premier et, s’ils ne le font pas, les États-Unis les expulseront. Les cours demandent aux États-Unis de faire des choses impossibles», a-t-il poursuivi.

Mettant à exécution l’une de ses menaces, le président Trump a annoncé «la réduction ou la suppression de l’aide américaine» à trois pays d’Amérique centrale. «Le Guatemala, le Honduras et le Salvador ont été incapables d’empêcher leurs gens de quitter leur pays pour tenter d’entrer illégalement aux États-Unis, a déclaré le président Trump sur Twitter. Nous allons commencer à supprimer ou à réduire substantiellement l’aide étrangère massive que nous leur acheminons régulièrement.» Les trois pays ont touché, ensemble, quelque 500 millions de dollars des États-Unis en 2017.

Toujours sur Twitter, le président Trump a blâmé les autorités mexicaines pour leur incapacité à juguler la marche des migrants. «Malheureusement, on dirait que la police et l’armée mexicaines sont incapables d’arrêter la caravane, a-t-il déploré. J’ai alerté la police frontalière et l’armée américaine en leur disant qu’il s’agissait d’une urgence nationale.»

De son côté, le gouvernement mexicain a prévenu les migrants qu’ils devaient présenter une demande d’asile au Mexique sans quoi ils seraient expulsés. La forte affluence de migrants mettra toutefois l’appareil gouvernemental mexicain à rude épreuve. Le Mexique a d’ailleurs demandé l’aide de l’ONU pour faire face à la situation. Plus de 3400 migrants honduriens ont d’ailleurs été renvoyés dans leur pays d’origine au cours des dernières 48 heures, selon la femme du président hondurien Juan Orlando Hernández, Ana Garcia de Hernández.

Qu’à cela ne tienne, une nouvelle colonne de quelque 1000 migrants, en provenance du Honduras, marche à travers le Guatemala en direction des États-Unis, selon le ministère de l’immigration guatémaltèque. Ces centaines de migrants, marchant sous un soleil de plomb, soutiennent se sentir plus en sécurité en progressant en convoi. «Nous allons y arriver, nous allons continuer d’avancer tant qu’ils ne nous arrêteront pas», a déclaré un Hondurien de 17 ans, Jaffe Borjas. Il marche avec un ami d’enfance en tête de la colonne. À l’approche de Tapachula, ils se sont mis à chanter : «Si vous nous renvoyez, nous reviendrons !»

D’après Radio Canada