L’histoire d’un cirque brésilien dans «O Grande Circo Místico» de Carlos Diegues

D’un amour contrarié entre un aristocrate et une envoûtante trapéziste naît un siècle de vie d’un cirque au Brésil, à travers plusieurs générations d’artistes audacieux, talentueux, passionnés, magiques et décadents. De l’inauguration en 1910 jusqu’à nos jours, les spectateurs suivent, avec l’aide de Célavi, le maître de cérémonie, les aventures et les amours de la famille Kieps, de leur apogée à leur décadence.

Photo : O Grande Circo Místico

«J’avais décidé de réaliser O Grande Circo Místico juste après avoir terminé Le plus grand amour du monde en 2006, explique Carlos Diegues, mais j’ai rencontré des difficultés dans sa gestation et sa production : plus que le scénario (l’adaptation du poème surréaliste de Jorge de Lima a été plus complexe que prévu), trouver l’argent nécessaire pour mener à bien ce projet a été laborieux… Toutefois, pendant ces douze ans, j’ai tourné trois documentaires, coproduit trois films d’autres réalisateurs et écrit un livre de 678 pages sur le cinéma brésilien. Je n’ai donc pas été inactif…»

«La culture brésilienne a toujours porté le baroque comme une tradition : dans la littérature (Guimaraes Rosa), la poésie (Jorge de Lima), la musique (Villa Lobos), l’architecture (Niemeyer), la peinture (Cicero Dias), etc… Pour moi, le cubain Alejo Capentier et le brésilien Jorge Amado sont les inventeurs du “réalisme magique” ; bien avant Gabriel García Márquez.  Avec O Grande Circo Místico, je voulais revenir à son esprit. Il existait dans Terra em transe de Glauber Rocha, Macunaima de Joaquim Pedro de Andrade, ou même dans mon film Os herdeiros, mais avait fini par être abandonné par le cinéma brésilien. À l’heure actuelle, les films des jeunes réalisateurs brésiliens sont très libres, chacun d’entre eux cherche une direction originale. Comme eux, je ne suis pas un cinéaste naturaliste car je crois que le naturalisme est incapable d’expliquer la culture brésilienne.»

«La musique a été écrite pour un ballet mis en scène au sud du Brésil dans les années 1980 mais qui n’a jamais été dansé sur scène à Rio ou São Paulo. Je ne l’ai jamais vu, mais en connaissais les chansons. J’adore la musique de Chico Buarque et Edu Lobo, mais peut-être plus encore l’œuvre de Jorge de Lima que j’ai toujours voulu porter à l’écran. Comme j’ai choisi ce poème, j’ai pensé que je pouvais utiliser quelques chansons du ballet, celles qui parlent du monde dans lequel on vit, qui met à l’épreuve chaque jour.»

Carlos Diegues, né en 1940, était le plus jeune et est actuellement le dernier représentant du cinema novo brésilien qui a vu éclore durant la décennie des années 1960 de très beaux films de Glauber Rocha, Joaquim Pedro de Andrade, Nelson Pereira dos Santos ou Rui Guerra.

Dans les années 1970, Diegues inaugure une période de grande popularité du cinéma brésilien avec Xica da Silva, qui bat le record du box-office à sa sortie ou Quilombo présenté à Cannes. Au début des années 1980, Carlos écrit et réalise Bye Bye Brésil, son film peut-être le plus connu. Il a tourné aussi une nouvelle version de Orfeu en 1999.

Le style de son film ressemble beaucoup à celui du chilien Alejandro Jodorowski. Nous sommes dans le baroque et l’esprit du réalisme magique. Cela peut sans doute dérouter certains spectateurs. En salle le 22 août.

Alain LIATARD

Bande annonce : Allo