Coup de théâtre à Caracas : un début de dialogue entre le gouvernement de Maduro et son opposition ?

Des représentants du gouvernement et de l‘opposition vénézuélienne ont tenu mercredi 13 et jeudi 14 septembre une série de discussions en République dominicaine afin de trouver une issue à la grave crise politique, économique et sociale que traverse le pays, sur fond de grandes manifestations qui ont fait plus de 125 morts depuis le mois d‘avril.

Photo : Infobae

Le gouvernement dominicain ainsi que l’ancien président du gouvernement espagnol Luis Rodríguez Zapatero ont exhorté en début de semaine le gouvernement vénézuélien de Nicolas Maduro à un dialogue « urgent ». Rodriguez Zapatero a rencontré à Saint-Domingue le ministre des Affaires étrangères dominicain Miguel Vargas, à l’issue de cette réunion, ils ont émis un communiqué dans lequel ils appellent au dialogue et se disent convaincus qu’il est possible d’entamer un processus de dialogue, de reconnaissance mutuelle et de réconciliation. Depuis Caracas, une partie de l’opposition vénézuélienne a nié les supposées conversations avec le gouvernement annoncées par Jorge Arreaza, ministre des Affaires étrangères. Cependant, d’autres sources annoncent que des dirigeants de la MUD, l’opposition se trouvent déjà à Saint-Domingue, invités par le gouvernement dominicain pour explorer un éventuel dialogue. Rodríguez Zapatero, soutenu par le Vatican depuis 2016, a été l’un des médiateurs de l’Union des nations sudaméricaines (UNASUR) pour le Venezuela aux côtés des anciens présidents dominicains Leonel Fernández et panaméen Martin Torrijos. Bien que ces tentatives de négociation aient été vouées à l’échec, Rodríguez Zapatero est resté en contact étroit avec le Venezuela.

L’opposition vénézuélienne à travers son porte-parole, le chef du Parlement, Julio Borges est arrivé à Saint-Domingue invité par le président dominicain Danilo Medina, mais avant son arrivée, il a déclaré sur son compte Twitter : « Pas de dialogue possible sans le respect des conditions telles que le respect de compétences de l’Assemblée nationale et sans une attention immédiate à la crise économique et sociale du pays. » Avec Borges, la délégation de l’opposition est formée par les députés Luis Florido, Timoteo Zambrano et le dirigeant Manuel Rosales. Parmi les exigences de Julio Borges, se trouve la définition d’un chronogramme incluant les élections présidentielles ; la libération de prisonniers politiques et leur réhabilitation.

Délégation de Maduro

Pour sa part, la délégation du gouvernement vénézuélien dirigée par le maire de Caracas, Jorge Rodríguez, accompagné de Delcy Rodríguez, présidente de l’Assemblée constituante et d’autres fonctionnaires, s’est montrée très optimiste sur les possibilités de parvenir à une concertation afin de résoudre les problèmes du pays, il s’est dit porteur de mots de paix. Nicolas Maduro est en visite officielle en Algérie depuis la nuit du dimanche 10 septembre à Alger pour une visite officielle de 24 heures, où il a participé à un sommet des chefs d’État de l’Organisation de la coopération islamique (OCI), au titre de président en exercice du Mouvement des pays Non-alignés. “Il existe une attitude très favorable pour parvenir à une négociation” a affirmé mercredi passé le président dominicain Danilo Medina après s’être réuni avec les dirigeants « chavistes » et l’opposition. Le dialogue a duré cinq heures, notamment sur la grave crise du pays. Le dialogue entre les parties reprendra le lendemain pour établir un agenda qui mène à une négociation définitive sur la crise, a précisé le président dominicain.

Pour sa part, le dirigeant de la Mesa de Unidad Democrática (MUD) Henry Ramos Allup, a déclaré à la presse que pour le moment il n’y a pas de dialogue avec le gouvernement et qu’il n’y aura pas sans que l’on remplisse leurs conditions : respect des institutions, libération des prisonniers politiques entre autres. Ce processus de dialogue est soutenu par le secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres qui essaie de créer un bloc des pays en accord avec l’opposition et avec le gouvernement vénézuélien pour initier les pourparlers pour « une issue absolument démocratique et institutionnelle de la crise ».

En France, le chef de la diplomatie, Jean-Yves Le Drian, après avoir reçu à Paris son homologue vénézuélien, Jorge Arreaza Montserrat, a affirmé le soutien de la France et précisé que ces discussions se tiendront sous l’égide de la République dominicaine et son président Danilo Medina et de l’ancien président espagnol, José Luis Rodríguez Zapatero. L‘entretien entre les ministres français et vénézuélien des Affaires étrangères, qualifié de “franc”, est intervenu au lendemain de l‘appel du Haut-Commissaire de l‘Onu aux droits de l‘Homme à une enquête internationale au Venezuela sur la répression des manifestations dans le pays, qui pourrait constituer selon lui des crimes contre l‘humanité.

“Je lui ai rappelé le risque de sanctions européennes et la nécessité pour le gouvernement du Venezuela de donner très vite des signes concrets de sa volonté de relancer les négociations avec l‘opposition dans le cadre d‘une démarche qui soit sincère et crédible”, a rapporté Jean-Yves Le Drian à l‘issue de l‘entretien avec son homologue. La France est “disposée à accompagner ce dialogue”, a dit Jean-Yves Le Drian. Et, il a rappelé “la vive préoccupation” de Paris face à la crise politique et économique vénézuélienne, précise le communiqué du Quai d‘Orsay.

Le président t vénézuélien Nicolás Maduro pour sa part, a déclaré depuis Caracas que son gouvernement acceptait “l’invitation” au dialogue avec l’opposition. Au cours de cette cinquième visite en Amérique latine, le pape François avait déjà évoqué le Venezuela le jour de son arrivée en Colombie et rencontré à Bogota des évêques et des cardinaux de ce pays en plein bouleversement politique et économique. Parmi les plus de 300 000 Vénézuéliens vivant en Colombie, des milliers sont arrivés récemment, fuyant les pénuries et les manifestations contre le président Nicolas Maduro.

Olga BARRY