« Une femme fantastique », un film du réalisateur chilien Sebastián Lelio, à ne pas manquer

Sebastián Lelio réalise en 2016 son quatrième film, après en particulier le très réussi Gloria sorti en 2014. Ici, il a obtenu l’Ours d’argent à Berlin pour le scénario écrit avec Gonzalo Maza. Il s’est toujours intéressé aux problèmes dans les familles puisque son premier film s’appelait La sagrada familia. Mais ici, il se tourne vers un personnage pas comme les autres puisque Marina est transsexuelle.

Marina vit avec Orlando, de vingt ans son aîné. Lorsqu’il meurt soudainement, Marina subit l’hostilité des proches de celui-ci : une « sainte famille » qui rejette tout ce qu’elle représente. Marina va se battre, avec la même énergie que celle dépensée depuis toujours pour devenir la femme qu’elle est : forte, courageuse, digne …

 « Avec Une femme fantastique, j’ai voulu répondre à cette question : que se passe-t-il quand on meurt dans les bras de la mauvaise personne ? Je trouvais ce point de départ très puissant…  Un jour, j’ai eu une autre intuition, celle de choisir une femme transgenre. Ce fut le déclic. Je trouvais l’idée exaltante mais j’avais un petit problème car je ne connaissais rien au sujet… Daniela Vega a été la troisième personne que nous avons rencontrée. En sortant du rendez-vous, je me suis dit que c’était tout à fait impossible de faire le film sans une actrice transgenre. Pour moi, cela aurait été une aberration, un anachronisme esthétique dans une époque où l’on voit émerger un nouveau paysage des genres. Faire l’inverse m’aurait rappelé les débuts du cinéma, quand les noirs avaient l’interdiction de jouer dans des films et les comédiens blancs se mettaient en scène, grimés en noir. »

Le Chili est un pays qui n’accepte pas les différences. Plusieurs films récents ont abordé le sujet. « Une femme fantastique arrive plus de 25 ans après la fin de la dictature, mais dans un pays qui reste profondément injuste, où la démocratie a beaucoup de carences. La rupture sociale reste là, comme un héritage du régime de Pinochet. C’est un pays qui fait preuve d’un capitalisme sauvage. Le film a effectivement lieu dans ce contexte-là. En termes de capitalisme, Marina est un être improductif. Elle n’est pas capable de procréer et donc de donner naissance à un autre employé, à un autre consommateur. Elle vit pour la beauté du geste. »  Un film qui ne peut nous laisser indifférent car filmé avec beaucoup de délicatesse.

Alain LIATARD

P.S. Sont encore dans certains bons cinémas : Rara  de Pepa San Martin sorti le 22 juin, Patagonia, el infierno d’Emiliano Torres, sorti le 28 juin, Kóblic de Sebastián Borenstein, le 5 juillet, en attendant Les filles d’Avril de Michel Franco, qui sortira le 2 août. On peut donc voir de bons films latinos cet été sur les écrans ! Voir aussi Allocine