L’Amérique latine doit-elle craindre le président Donald Trump ?

Les déclarations fracassantes du candidat Donald Trump seront-elles confirmées par le président élu ? Les gouvernements latino-américains ont des raisons de le craindre car la mise en pratique des intentions déclarées serait désastreuse pour le reste du continent.

Le Mexique et l’Alena    C’est le Mexique qui risque les plus graves problèmes. La signature par les États-Unis, le Canada et le Mexique de l’Accord de libre-échange (Alena) avait plutôt réussi à ce pays qui voyait débarquer de nombreuses entreprises états-uniennes venant profiter de la main d’œuvre mexicaine bon marché (les maquilas). Les salaires étaient très bas, mais, pour les Mexicains, c’était mieux que pas d’emploi du tout… Par contre, de nombreuses usines fermaient leur porte aux États-Unis, privant d’emploi des centaines de milliers de travailleurs, exactement ceux qui viennent d’élire Trump sur sa promesse de ramener les emplois au pays. Ce qui retournerait complètement la situation puisque des centaines de milliers de Mexicains perdraient alors leur emploi. Cela plus les millions d’immigrants que le nouveau président promet d’expulser annonce des temps très difficiles pour le Mexique. La ministre des Affaires étrangères, Claudia Ruiz, a demandé aux consulats mexicains de préparer « des plans de protection et d’assistance consulaire », appelle au calme ainsi qu’à éviter les provocations.

L’Amérique centrale     La menace d’expulsion de millions d’immigrants est un vrai problème pour les pays centraméricains, en particulier le Guatemala, le Honduras et le Salvador où le manque de travail pousse des dizaines de milliers de personnes à émigrer vers les États-Unis au risque de leur vie. Le président Obama a bien tenté de réduire cette émigration en expulsant plus de trois millions d’immigrants et en soutenant le Triangle Nord d’Amérique centrale et ses accords commerciaux avec le Mexique et la Colombie, mais sans grands résultats. Or les habitants pauvres de ces trois pays dépendent beaucoup de l’envoi d’argent provenant des migrants qui sont parvenu à entrer aux États-Unis et à y trouver du travail (les remesas). Le mur que le président Trump annonce vouloir construire et la menace d’imposer une taxe de 35 % sur l’envoi des remesas pour financer ce mur tombent comme une douche froide sur ces pays.

La Colombie    Les accords de paix signés par le gouvernement colombien et la guérilla avaient reçu le soutien de Washington. Le nouveau président US, non seulement se désintéresse clairement des conséquences qu’auront ses décisions au  sud de ses frontières mais serait plutôt « un faucon ». Continuera-t-il à soutenir le gouvernement du président Juan Manuel Santos ou basculera-t-il vers Alvaro Uribe son opposant aux accords et partisan de la lutte à mort contre les FARC plutôt qu’un accord de paix ? Le doute est permis…

Le Venezuela   Considéré déjà comme « un danger spécial pour la sécurité des États-Unis » par le président Obama,  quelle sera la position du président Trump sur les rapports entre les deux pays ? Le fait que non seulement la UNASUR (Union des nations d’Amérique du Sud) promeut des discussions devant mener à des accords politiques plutôt qu’à des confrontations violentes, mais que le Vatican aussi a envoyé son représentant à la demande de l’opposition, pourrait modérer tout excès de mesures extrêmes.

Cuba   Très anti-communiste, le président Trump va-t-il poursuivre le cycle de réchauffement avec Cuba entamé par le président Obama, rien n’est moins sûr… Bien que pour la première fois en 50 ans, les États-Unis (et Israel, leur seul fidèle allié sur ce point), se soient abstenus lors du vote contre l’embargo aux Nations Unies cette année, l’embargo commercial est toujours en vigueur. Que fera le président Trump ? D’autre part,malgré ses diverses promesses, le président Obama n’a finalement pas pu ou voulu fermer la prison de Guantanamo. Que fera le président Trump ? La fermer d’office ou… la remplir à nouveau ?

Le Cône Sud, l’Asie, l’Europe et… les États-Unis   Pour terminer cette brève analyse, le reste du monde aussi attend avec inquiétude la formation du cabinet Trump et les premières mesures du nouveau gouvernement. L’intention déclarée de se retirer des divers accords multilatéraux et de ne pas poursuivre les discussions visant à en créer d’autres (en Asie et en Europe) inquiètent particulièrement. Le patronat US n’est pas non plus trop heureux car il ne pourra plus exploiter les millions de migrants qui travaillent pour des peanuts ce qui affectera leurs gros bénéfices… La question que tout le monde se pose avec inquiétude est : le président Donald Trump va-t-il ou peut-il accomplir les promesses du candidat Trump Donald ?

Jac FORTON