« Le professeur de violon », film brésilien de Sergio Machado en salle cette semaine

Violoniste de talent, Laerte n’a pas réussi à intégrer l’orchestre symphonique de l’État de São Paulo et est contraint d’enseigner la musique à des adolescents de l’école publique d’Heliópolis. Malgré les difficultés, le pouvoir de la musique et l’amitié qui se développe entre le professeur et ses élèves lui ouvrent les portes d’un nouvel univers pour lui comme pour ses élèves.

Le film est adapté d’une pièce d’Antonio Ermírio de Moraes écrite à partir de l’expérience de l’Instituto Baccarelli dont l’objectif est d’offrir une formation musicale et artistique aux jeunes de la communauté d’Heliópolis.  « Quand on s’est mis au travail, raconte Sergio Machado le réalisateur du film, on a essayé d’avoir le maximum d’informations sur l’histoire de l’Institut Baccarelli afin de définir au mieux l’univers du film. Marta Nehring, scénariste et documentaliste, est même allée jusqu’à s’installer temporairement à Heliópolis. Nous avons interviewé des dizaines de musiciens et de professeurs et nous avons également discuté avec les musiciens qui jouaient aux débuts de l’Orchestre et que l’on aperçoit dans le film. Cependant, il était clair pour nous qu’un seul film ne suffirait pas à mon¬trer l’immensité du projet qui a consisté à sensibiliser des millions d’ado¬lescents issus de milieux défavorisés à l’apprentissage de la musique. Au bout du compte, le scénario final est à la croisée des chemins : un mé¬lange de l’histoire de cette formation qu’est l’Institut Baccarelli, de la pièce Acorda Brasil d’Antônio Ermírio de Moraes et de mes propres interrogations Je ne me fais pas d’illusions : un film n’est pas en mesure de changer la réalité d’un pays. Je pense cependant qu’il peut aider à stimuler le dialogue sur le rôle de la culture et des arts dans l’éducation de nos jeunes citoyens ».

 Au cours de la dernière décennie, le Brésil a fait d’énormes progrès en matière de redistribution des revenus, mais en ce qui concerne l’éducation et l’accès à la culture, peu d’avancées ont été réalisées. Pour le réalisateur du film Le professeur de violon, ils ont fait appel aux acteurs expérimentés comme Lázaro Ramos (qui jouait dans Madame Sata de Karim Aïnouz ) et Sandra Corveloni (Prix d’interprétation à Cannes pour Lin-Ha de passe de Walter Salles), mais aussi à des acteurs en début de carrière comme Kaique Jesus, et des personnes issues des quartiers comme Elzio Vieira et tous les autres adolescents qui ont interprété les musiciens de l’Orchestre. Il y a aussi une apparition spéciale des rappeurs Criolo et Rappin’ Hood et du maestro Marin Alsop de l’Orchestre symphonique de São Paulo.  Une partie des adolescents de l’Orchestre a été recrutée parmi les musiciens de l’Orchestre d’Heliópolis, mais beaucoup d’autres ne savaient même pas jouer d’un instrument. Ils ont suivi des cours et puisque le tournage a été reculé de quelques mois, ils ont finalement eu la chance de se construire une sérieuse base musicale.

Le film est très sensible et suit aussi l’évolution de Laerte qui veut devenir un grand violoniste de l’Orchestre Symphonique de Sao Paulo. Le film est donc très accessible à un large public, surtout qu’il ne faut pas oublier la dangerosité de la favela. Les quelques plans de manifestation sont issus de vraies archives. Il fallait aussi faire tout un travail sur la chaleur de la couleur, pour ne pas dénaturer les lieux. Sergio Machado est fils de musiciens et collabore pour la première fois avec Walter Salles en 1995. Assistant réalisateur sur les films Central do Brasil, Le premier jour et Avril brise, il était également coscénariste de ce dernier film. Il a aussi cosigné le scénario du film Madame Sata de Karim Aïnouz.

En 2001, il signe la réalisation du documentaire Onde a Terra acaba sur le cinéaste Mário Peixoto. Il a obtenu plus de trente récompenses avec son premier long métrage Bahia, Ville Basse, y compris le prix de la jeunesse à Cannes.  En 2007, il réalise et coécrit avec Karim Aïnouz la série télévisée Alice pour HBO. En 2009, il adapte à l’écran le roman de Jorge Amado A morte e de Qincas Berro d’agua. Il a également dirigé, avec Fernando Coimbra, le documentaire Aqui deste lugar avant de réaliser Le professeur de violon en 2015.  Un film que je vous encourage à voir.

Alain LIATARD

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