43 ans après sa disparition au Chili, justice enfin pour le Français Étienne Pesle

Le 19 septembre 1973, une semaine après le coup d’Etat du général Pinochet, le Français Etienne Pesle se rend  à l’INDAP (Institut de développement agricole)(1), son lieu de travail à Temuco, une ville située à 800 km au sud de Santiago.  A 11h, une patrouille de militaires de la FACH (Force aérienne du Chili) l’arrête sans montrer de mandat d’arrêt et l’emmène à leur base de Maquehue. Après des jours de tortures, il disparait.

En décembre 2010, un procès s’ouvre à la Cour d’Assises de Paris pour juger quinze militaires chiliens accusés d’être les responsables de la disparition de quatre Français au Chili et en Argentine : Georges Klein, Alphonse Chanfreau, Jean-Yves Claudet et Étienne Pesle. Cinq autres accusés, dont le général Augusto Pinochet, décédés, sont retirés de la plainte. Aucun des accusés n’est présent ni ne s’est fait représenter par un avocat, certains parce qu’ils sont déjà en prison au Chili, d’autres parce qu’ils refusent de reconnaître la légitimité du tribunal français… Celui-ci base sa légitimité sur la loi française dite de juridiction personnelle passive, un article du Code pénal qui permet à des magistrats français de juger des dossiers concernant l’assassinat d’un citoyen français à l’étranger. Le verdict de la Cour : des condamnations de 15 ans à la perpétuité (2).

Au Chili, il faudra attendre 2016 pour que la justice se prononce sur la disparition d’Étienne Pesle. Le 10 mai dernier, pour « association illicite et séquestration qualifiée » de Pesle, le juge Mario Carroza a condamné neuf militaires de la FACH : Emilio Sandoval Poo, Crisostomo Fernández, Jorge Valdebenito, Heriberto Pereira, Luis Yañez, Luis Soto, Enrique Rebolledo, Leandro Reyes et Jorge Soto. Sandoval Poo avait déjà été condamné à quinze ans de réclusion par le tribunal de Paris de 2010.

La justice tarde souvent mais les familles des victimes et les associations de défense des droits humains au Chili et en France ont inlassablement lutté pour qu’elle se fasse. Les restes de Georges Klein ont été retrouvés et ont pu être dignement enterrés. Les corps de Alphonse Chanfreau, Jean-Yves Claudet et Etienne Pesle n’ont toujours pas été retrouvés…

Jac FORTON

(1) Créé lors de la Réforme Agraire de 1962 par le gouvernement de Jorge Alessandri, puis très lié à la réforme agraire lancée par le président Allende. / (2) Pour connaître les détails de ce procès, lire le livre Pinochet, le procès de la dictature en France, de Jac Forton, éditions Toute Latitude.