La semaine du 1er au 6 avril 2013

1 – CHILI – Le président du Parti socialiste (PS) du Chili, Osvaldo Andrade, a déclaré que José Miguel Insulza  (70 ans), actuellement Secrétaire général de l’Organisation des États américains (OEA), lui a fait part de son désir de revenir à la politique au Chili et de se battre pour un siège au Sénat  lors des élections de novembre prochain. L’avocat José Miguel Insulza, qui a pris ses fonctions en mai 2005, et a été réélu en 2010, a eu un mandat difficile en tant que chef de l’OEA pour la relation complexe avec les pays du bloc de l’ALBA, comme avec les États-Unis. Son mandat devrait se terminer officiellement en 2015. La presse locale a rapporté en janvier que, lors d’un voyage à Santiago fait à cette date, le chef de l’OEA et les chefs du PS ont discuté de la possibilité de le désigner candidat dans la circonscription de Coquimbo. Jusqu’à présent, toutefois, le Parti socialiste chilien n’avait pas confirmé publiquement l’information, qui a été traitée dans la plus stricte confidentialité pour ne pas interférer avec son travail dans l’organisme international. Malgré sa réputation au Chili, José Miguel Insulza n’a jamais été incité à se présenter à des élections parlementaires.

1 – VENEZUELA – Principale préoccupation des Vénézuéliens, la lutte contre la criminalité domine la campagne présidentielle. Nicolas Maduro, président par intérim et candidat du Parti socialiste unifié du Venezuela (PSUV), a promis de faire du problème « le grand sujet des prochaines années », « la priorité de toute son action  à la tête du gouvernement ». Le candidat de l’opposition, Henrique Capriles Radonski, n’a de cesse, lui, de rappeler le bilan désastreux en la matière du président Hugo Chávez, mort le 5 mars. M. Capriles se présente comme « la solution ». Le Venezuela est devenu le deuxième pays le plus meurtrier au monde, après le Honduras. À l’appel de la coalition qui soutient M. Capriles, plusieurs milliers de Vénézuéliens sont descendus dans les rues de Caracas pour une « marche nocturne contre l’insécurité ». Dans les locaux de l’Université nationale expérimentale de sécurité (UNES) qui forme la nouvelle police « bolivarienne », M. Maduro avait lancé le « Mouvement pour la paix et la vie ». Les sondages sont unanimes. Les Vénézuéliens placent l’insécurité largement en tête de leurs préoccupations, bien avant le chômage ou l’inflation. « La criminalité n’est pas un phénomène nouveau. Mais elle n’a cessé d’empirer depuis quatorze ans. En 1998, année de la première élection d’Hugo Chavez, le pays enregistrait 4 500 homicides », rappelle Roberto Briceño, directeur de l’Observatoire vénézuélien de la violence (OVV), une organisation non gouvernementale. En 2012, il y en a eu 16 072, selon le ministère de l’intérieur, soit un taux national de 55 homicides pour 100 000 habitants. L’OVV avance le chiffre de 21 692 homicides, soit un taux de 73 pour 100 000 habitants. A titre de comparaison, il est de 3 au Chili et de 34 en Colombie, où sévissent guérillas et mafias.

2 – URUGUAY – Le Sénat uruguayen a voté le projet de loi qui institue le mariage entre personnes du même sexe à une écrasante majorité (23 voix sur 31). Le mariage gay a été approuvé par les sénateurs de la coalition gouvernementale de centre gauche, le Frente Amplio (Front large), et aussi par des élus de l’opposition, issus des deux formations traditionnelles, le Parti national (centre droit) et le Parti Colorado (droite). La Chambre des députés devra réexaminer le texte, légèrement amendé, mais c’est une simple formalité, puisque le projet de loi sur le « mariage égalitaire » avait été largement approuvé, en décembre 2012, par 81 députés sur les 87 présents. Un amendement du Sénat vise à relever l’âge minimal pour le mariage : 16 ans quel que soit le sexe, au lieu de 12 ans pour les filles et 14 ans pour les garçons. L’Uruguay devient ainsi le deuxième pays d’Amérique latine à adopter le mariage pour tous, après l’Argentine en 2010.

3 – ARGENTINE – Au moins 25 personnes sont mortes dans la ville de La Plata, à 60 km de Buenos Aires, à la suite d’inondations,    des milliers d’habitants ont été évacués de leur logement, selon le gouverneur de la province. De fortes pluies se sont également abattues sur l’agglomération de Buenos Aires, faisant au moins 8 morts. Selon le quotidien argentin Clarín, en à peine trois heures sont tombées plus de 300 millimètres d’eau sur la capitale. « Je n’ai jamais vu de chose égale. Cette situation n’a pas de précédents (…) Pour le moment, nous pouvons confirmer un minimum de 25 décès. Les corps sont apparus quand les eaux ont commencé à baisser » a dit lors d’une conférence de presse Daniel Scioli, le gouverneur de la province de Buenos Aires, qui englobe La Plata. La moitié de cette agglomération de 900 000 habitants a été inondée et se trouvait sans électricité. Des voitures flottaient dans les rues et la ville était partiellement paralysée. Plus de 2 000 personnes ont dû abandonner leur logement sous les eaux. A Buenos Aires, 350 000 personnes ont été affectées par les inondations survenues en pleine nuit, mardi entre 00h00 et 07h00. Un agent du métro est mort électrocuté dans une station lors d’une opération de pompage. Les habitations précaires ont été particulièrement touchées, et la tempête a également causé une série de coupures de courant, des chutes d’arbres et l’interruption de plusieurs services de transports en commun.

3 – HONDURAS-NICARAGUA – Les gouvernements du Nicaragua et du Honduras négocient un accord pour éviter une escalade du conflit sur le golfe de Fonseca, [photo de la une] une entrée de l’océan Pacifique dont ils partagent les côtes avec El Salvador. Le président du Nicaragua, Daniel Ortega et son homologue du Honduras, Porfirio Lobo, ont tenu une réunion secrète à Managua où ils ont discuté des solutions possibles à la crise suite à la menace du Honduras d’utiliser sa force aérienne pour garantir sa souveraineté sur le golfe. Le golfe de Fonseca, de 3.200 kilomètres carrés, est la garantie de sortie vers l’océan Pacifique du Honduras qui accuse El Salvador et le Nicaragua d’avoir violé sa souveraineté sur les eaux de l’entrée, de sorte qu’il exige le respect d’un arrêt rendu par la Cour internationale de Justice le 11 Novembre 1992, qui a déclaré que le contrôle du Golfe doit être partagée entre les trois pays. Le Honduras affirme que les autorités navales d’El Salvador et le Nicaragua empêchent à ses citoyens de pêcher, qu’ils sont constamment menacés et que le 17 mars la Marine du Nicaragua a capturé deux pêcheurs honduriens. Porfirio Lobo a déclaré après l’incident, qu’il ne veut pas de conflit dans la région, à partir de trois pays qui « se partagent la pauvreté ». Daniel Ortega a déclaré qu’ « il y a une volonté clairement exprimée » des trois pays à surmonter le différend. Une autre réunion est prévue à laquelle participera le président salvadorien Mauricio Funes, peut-être la semaine prochaine. L’année dernière les trois présidents ont signé une déclaration établissant un protocole d’entente visant à convertir le Golfe « en une zone de développement de la paix, de la sécurité et durables ». Les trois présidents ont convenu de créer une commission spéciale des ministres des Affaires étrangères des trois pays pour examiner la mise en œuvre de l’arrêt de la Cour internationale de Justice.

4 – VENEZUELA – Après quinze mois de recherches minutieuses, le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ, sigle en anglais) diffuse publiquement des fortunes cachées dans les paradis fiscaux, avec 12.000 mouvements d’entreprises et près de 13.000 individus impliqués. Le ICIJ a eu accès à quelques 2,5 millions de fichiers numériques, fondamentalement des Iles Vierges des Etats-Unis, Iles Vierges Britanniques, Iles Cook et d’autres «cachés» en haute mer, dont la taille totale des fichiers est «160 fois» supérieure aux fuites de Wikileaks en 2010 concernant des documents relatifs au Département d’Etat américain, a déclaré l’organisation. L’ICIJ désigne des milliers de comptes offshores des trois points du continent américain qui concernent les fortunes cachées : Canada, États-Unis et Venezuela. Pour ce qui du Venezuela des personnes sont impliquées. Francisco Illarramendi, un Vénézuélien de naissance et à la tête d’une entreprise d’investissement dans l’Etat américain du Connecticut, a créé une chaîne de Ponzi de milliards de dollars conjointement au financier vénézuélien Moris Beracha –  un proche d’Hugo Chavez –  selon ICIJ. Plusieurs procès devant les tribunaux fédéraux des États-Unis font valoir que les deux hommes ont détourné l’argent des investisseurs dans un dédale de sociétés offshore allant des îles Caïmans à la Suisse en passant par le Panama, pour lequel ils ont soudoyé des fonctionnaires du régime bolivarien. La fraude gigantesque s’est effondrée en 2011, causant des pertes de centaines de millions aux investisseurs, y compris à un membre d’une des familles les plus riches du Cône Sud de l’Amérique latine. Selon les rapports de l’ICIJ, basés sur des documents judiciaires, le schéma de Ponzi a aussi dévoré une partie de la caisse de retraite de la compagnie pétrolière d’Etat PDVSA et la caisse qui a alimenté la révolution du commandante. Francisco Illarramendi a plaidé coupable en 2011 aux accusations portées contre lui aux Etats-Unis, mais Moris Beracha, qui n’a pas été inculpé par la justice américaine, insiste sur le fait que, loin de participer à la fraude de son partenaire et ami, il en a été victime. Autre personne impliquée dans l’affaire, Juan Montes, ancien directeur des placements de PVDSA,  aurait empoché plus de 30 millions de pots de vin pour avoir permis les transactions complexes entre le fond de pension du pétrole et les fonds d’ investissements de Francisco Illarramendi.

5 – AMÉRIQUE LATINE – Selon le rapport que vient de publier la Banque Mondiale, l’obésité augmentera de 300%  dans les 25 prochaines années et passera 60 millions d’obèses en 2005 à 191 millions en 2030, en Amérique latine. Selon le document, l’obésité touche également d’autres zones géographiques en développement et la moitié des personnes obèses dans le monde est située dans neuf pays: la Chine, les États-Unis, l’Allemagne, l’Inde, la Russie, le Brésil, le Mexique, l’Indonésie et la Turquie. Parmi les facteurs qui expliquent cette augmentation en Amérique latine, l’expert agricole Willem Janssen de la Banque mondiale affirme que le passage de la campagne vers les villes – aujourd’hui 75 % de la population vit en zone urbaine –  avec des emplois plus sédentaires influe sur l’obésité, mais aussi l’utilisation systématique de transport de masse et la consommation de nourriture moins chère, mais inférieure sur le plan nutritionnel. L’obésité est concentrée dans les couches inférieures de la société. Pour la Banque mondiale, la solution passe par la diffusion des résultats des campagnes de sensibilisation des consommateurs: « Nous devons nous assurer que les gens apprennent ce qu’il faut manger ». Pour cela, elle estime nécessaire que l’information passe par les systèmes éducatifs. « Ensuite cela peut venir de la réglementation, mais plutôt que de se concentrer sur l’interdiction de certains produits le défi doit être mis de proposer une alternative nutritive, de qualité et de bon goût », a déclaré le fonctionnaire. Le document de la Banque mondiale affirme que les politiques publiques ont jusqu’ici abordé uniquement une partie du problème. « Dans le cas de l’Amérique latine l’obésité est un phénomène relativement récent. Trop souvent, l’attention des politiciens se concentre sur le problème de l’autre côté, le manque de nourriture. Le profil de l’obésité évolue et avec elle la conscience des politiques de classe à cet égard. Jusqu’à présent, cela était seulement une préoccupation des nutritionnistes et des petits groupes au sein des ministères de la santé. Sur ce sujet, la Banque mondiale devrait faire un effort pour sensibiliser les pays », conclut M. Janssen.

5 – BRÉSIL – Le ministère public de Brasilia a demandé à la police fédérale d’ouvrir une enquête sur les allégations contre l’ancien président Luiz Inacio Lula da Silva et son ministre des finances Antonio Palocci, lancées par l’entrepreneur Marcos Valerio, condamné à 40 ans de prison pour avoir organisé le réseau appelé le cas mensalão, l’affaire de la corruption politique la plus sévère de l’histoire récente du Brésil. Marcos Valerio a déclaré en septembre dernier au procureur général de la République, Roberto Gurgel, que Lula avait été le médiateur d’un transfert de sept milliards de réales (3,4 millions de dollars) réalisé par un fournisseur de Portugal Telecom à Macao (Chine) pour le Parti des travailleurs (PT). Cet argent sera utilisé pour payer des dettes du parti de l’ex-président du Parti contactées durant la campagne présidentielle qui lui a donné la victoire en 2002. L’argent serait entré au Brésil par le biais des comptes de plusieurs chefs images de marque du parti. C’est la première fois que s’ouvre une action en justice pour enquêter sur la possible implication directe de Lula da Silva dans le cas mensalão, dans lequel ont été condamnés certains membres de la direction du PT, à commencer par l’ancien ministre, José Dirceu, le bras droit de Lula da Silva lors de son premier mandat, qui a été condamné à dix ans de prison pour être le créateur du système de corruption. Maintenant, Marcos Valerio devra de nouveau être interrogé par la police fédérale, qui désire savoir s’il confirme les graves allégations portées contre l’ancien président au procureur général de la République.

6 – AMÉRIQUE LATINE – Une étude que vient de publier le Système d’information sur les tendances de l’éducation en Amérique latine (SITEAL), une organisation liée à l’IEO et l’UNESCO, révèle que les pays latino-américains ont réussi avec beaucoup d’efforts dans la dernière décennie à accroître les places à l’école et à obtenir l’accès à l’éducation à plus d’enfants pauvres. Plus de 97 % de tous les enfants âgés de 7-12 ans fréquentent l’école (deux points de plus qu’en 2000), et plus de 83 % des adolescents âgés de 13-17 (six points). Cependant, cette étude met en évidence d’autres causes de l’abandon scolaire qui vont émerger – ou devenir plus visibles – à mesure que  l’école se répand dans toutes les couches de la société. « Dans l’ensemble, sept enfants et adolescents non scolarisés sur dix proviennent des ménages les plus exposés aux difficultés économiques. Toutefois, on observe que parmi les adolescents qui ne fréquentent pas l’école, a augmenté la proportion de ceux qui proviennent de secteurs socio-économiques moyens et supérieurs, tandis que le poids relatif de ces secteurs a augmenté avec l’âge », explique l’étude. De cette manière, bien que dans les âges les plus précoces, le principal motif de désertion soit purement et simplement la pauvreté, au fur et à mesure qu’arrive l’adolescence, apparaissent des facteurs comme « le désintérêt pour étudier« , l’impossibilité de concilier étude et travail ou les responsabilités familiales selon les données de la dernière décennie de la Bolivie, du Chili, du Panama, du Costa Rica, du Nicaragua et du Paraguay. Et, toujours à ces âges apparaît comme principal motif d’abandon le désintérêt pour les études. Le spécialiste chilien de l’Université Alberto Hurtado, Juan Eduardo García Huidobro, insiste sur le fait que « la raison plus prosaïque pourrait être qualifiée d’ennui ». Comme cet expert le suggère dans le rapport de SITEAL – « qui décrit bien, avec les données actuelles, un sujet qui a été vu depuis un certain temps » – il y a « un problème de structure » : « L’enseignement secondaire en Amérique latine est très rigide, il n’offre pas un certain nombre d’alternatives pour les rendre compatibles avec d’autres options. Une politique minimum serait de fournir plus de qualité et de dédramatiser les options vespérales, en alternance [travail], etc. »

Guy MANSUY

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